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Bienvenue sur VISIONS ARABES.
Vu de France et d'Occident en général, le monde arabe apparait
souvent bien compliqué et irrationnel tant dans son fonctionnement
que dans l'enchainement et le rythme temporel des évènements.
Visions Arabes a pour but principal d'apporter
un éclairage original prioritairement
à travers des analyses et opinions de spécialistes issus
du monde arabe lui-même.
Comme, le plus souvent, celles-ci sont issus de la presse ou de la blogosphère
arabe,
il est nécessaire d'en saisir les subtilités grâce
à une maitrise absolue de la langue arabe. Leurs auteurs peuvent
vivre sur place ou être "exilés" en Occident ou
même ailleurs.
Voilà pourquoi Visions Arabes propose
de développer une interactivité entre la connaissance de
la langue et des opinions averties venues le plus souvent d'Orient.
Dans
cet article de Nahid Hattar paru le 11 juillet 2014 sur le site
du quotidien libanais al-Akhbar sous le titre " Le Hezbollah
vers l'Irak aussi ? ", le chroniqueur expose ce
qu'il pense être les quatre phases de l'évolution
du Hezbollah qui serait passé de parti religieux en parti
laïque.
L'extrait que nous traduisons ci-après porte sur ces quatre
phases ; l'article original, rédigé en arabe
(voir
le PDF ci-après, http://www.al-akhbar.com/node/210425 ),
fait le lien entre cette évolution du Hezbollah
et l'hypothèse de son intervention future en Irak contre
le califat sunnite de l'EIIL (État islamique de l'Irak
et
du Levant).
Le
Hezbollah du Liban est passé par quatre phases :
Au
départ, c'est un parti religieux qui résiste certes
[à Israël], mais c'est surtout un parti qui est
atteint de tous les symptômes pathologiques de tout parti
religieux : Fanatique, hostile aux forces de la société
civile et plombé par le péché originel
de tout mouvement islamique politisé, à savoir
la volonté d'imposer à la société
son propre modèle juridique et culturel islamique. À
cette époque, le Hezbollah voyait le monde divisé
en deux camps religieux, à tel point qu'il soutint les
efforts des Bosniaques rétrogrades désireux de
se séparer de la Yougoslavie anti-impérialiste
pour la simple raison que ces Bosniaques étaient musulmans
!
Lors
de la deuxième phase (qui s'est cristallisé dans
les années 90 du siècle dernier), le Hezbollah
est devenu, e premier lieu, un mouvement de résistance
visant à libérer les territoires libanais de l'occupation
israélienne ; ainsi, tout en conservant ses motivations
religieuses, il est passé - dans les faits - du champ
de la Chari`a à celui de la Résistance. Et, malgré
toutes les réserves que l'on peut avoir sur l'entente
du Hezbollah, à cette époque, avec le projet néolibéral
de Hariri, l'on retiendra surtout de cette deuxième phase
que le Hezbollah y adopta la parole laïque du Christ :
" Rends à César ce qui est à César,
et à Dieu ce qui est à Dieu ".
Dans
la troisième phase, qui commence en 2006, avec la victoire
du Hezbollah sur la machine de guerre israélienne, celui-ci
est devenu une force de dissuasion nationale et arabe ; il garda
certes son nom de Hezbollah, mais il se transforma dans les
faits en un parti de l'indépendance libanaise, un parti
qui défend la terre, la souveraineté et les richesses
nationales, qui interdit l'agression [israélienne] et
permet le progrès.
Cette victoire de 2006 couronna l'évolution politique
du Hezbollah vers la laïcité nationale, exprimée
par le document d'entente signé avec le Courant Patriotique
Libre [qui est la principale force politique chrétienne
au Liban, dirigée par le Général Michel
Aoun]. Car, quand un parti religieux renonce, dans sa stratégie,
à appliquer la Chari`a sur l'État, ce parti a
fini d'évoluer de [l'étroit] champ religieux vers
le [large] champ national.
Enfin,
dans la quatrième phase, et par sa glorieuse participation
à la défense du régime patriotique et laïque
syrien, le Hezbollah est passé du statut de force nationale
libanaise à celui de force régionale, plus précisément
une force du Machrek. Et, dans le creuset du combat qu'il mène
en Syrie, le Hezbollah a affiné ses outils d'analyse
politique : S'il continue à voir le monde divisé
en deux camps, ces deux camps ne sont plus distingués
par la religion mais par l'opposition à l'impérialisme.
Cette opposition à l'impérialisme, plutôt
que l'opposition aux autres religions, est désormais
le critère du Hezbollah pour nouer ses alliances.
Ainsi, ce même Hezbollah qui, il y a un quart de siècle,
soutenait les Bosniaques rétrogrades contre les Serbes
orthodoxes, est maintenant dans le camp russe orthodoxe en Ukraine
! Et comment s'en étonner, quand on sait le Hezbollah
est aujourd'hui membre d'une alliance qui va de Pékin
à Moscou, à Téhéran, à Bagdad,
à Damas et au Liban ce Liban dont une partie des
habitants refuse encore à ce que leur petit pays jouisse
d'un rang si élevé !
Dix-huit ans après son lancement, la chaine d'information
panarabe Al-Jazeera a élargi sa notoriété
et son audience au moment des évènements du 11 Septembre
ainsi qu'à travers son canal en langue anglaise.
Cette mondialisation de sa diffusion ainsi que le rôle de
l'état du Qatar dans la situation géopolitique de
la région ne font qu'accélèrer son évolution
de diffuseur vers celle d'acteur. Le traitement récent
de certains journalistes de la chaine en Egypte vient rappeler
ses multiples facettes au moment ou sa ligne éditoriale
était loin de faire l'unanimité dans un monde arabe
plus divisé que jamais. Faut-il y voir une fin de règne
médiatique alors même qu'elle a été
notoirement imaginée à l'époque par une famille
franco-israelienne? Il semble
bien qu'avec l'émergence des réseaux sociaux, il
n'est plus aussi aisé d'utiliser un média tel Al-Jazeera
comme instrument de rayonnement dans un univers compliqué
et que cet outil peut devenir, au
fil du temps, plus délicat à gérer au service
de ses objectifs initiaux parfois aussi flous que mouvants. Que
certains rivaux du Qatar sur la scène arabe en fasse dès
lors une cible symbolique à affaiblir ne semble donc pas
si surprenant. Une
sorte d'effet boomerang à surveiller de près et
qui ne devrait pas faiblir... La
presse arabe francophone fait elle-même l'écho de
cette évolution rapide du statut de la chaine d'information
Al Jazeera, notamment à la lumière des récents
évènements en Egypte.
Al-Jazeera, victime du retournement de situation dans les pays
du Printemps arabe Trois
journalistes de la chaîne qatarie, jugés pour soutien
aux Frères musulmans, ont été condamnés
le lundi 23 Juin par un tribunal égyptien à des
peines de sept à 10 ans de prison.
La
chaîne qatarie Al-Jazeera, dont des correspondants en Egypte
ont été condamnés à de lourdes peines
de prison, subit les contre-coups du retournement de la situation
dans les pays du "Printemps arabe" où elle avait
été le porte-voix de la contestation.
Décrié à travers le monde, ce verdict de
la justice égyptienne apparaît comme un autre épisode
du bras de fer que se livrent le nouveau pouvoir au Caire, foncièrement
hostile aux Frères musulmans, et les autorités du
Qatar qui, malgré les pressions, continuent de défendre
la confrérie islamiste.
Trois
journalistes d'Al-Jazeera, dont l'Australien Peter Greste, jugés
pour soutien aux Frères musulmans, ont été
condamnés lundi par un tribunal égyptien à
des peines de sept à 10 ans de prison. Onze autres, jugés
par contumace --dont trois journalistes étrangers, deux
Britanniques et une Néerlandaise-- ont été
condamnés à 10 ans de prison.
Ce verdict, qualifié d'"injuste" par la direction
du réseau d'Al-Jazeera, est "un coup porté
à la liberté de la presse", relève
Kamel Laabidi, défenseur tunisien de la liberté
d'expression". Mais, ajoute-t-il, "Al-Jazeera, qui
était la voix des sans voix, s'est alignée après
le Printemps arabe sur certains courants politiques comme les
Frères musulmans en Egypte et Ennahdha (islamiste) en
Tunisie", soulignant que "cela avait affecté
son objectivité et partant son image dans la région".
Al-Jazeera avait ainsi dédié une chaîne
entière -Misr Mubasher- à la couverture de la
contestation du pouvoir mis en place par l'armée en Egypte
et à la défense des partisans du président
islamiste déchu par l'armée le 3 juillet 2013,
Mohamed Morsi.
Mais
au delà de l'Egypte, Al-Jazeera cristallise les tensions
entre le Qatar et plusieurs de ses voisins.
Ainsi l'Arabie saoudite en froid diplomatique avec Doha exige,
entre autres, qu'Al-Jazeera arrête sa couverture jugée
biaisée en faveur des islamistes en Egypte et ailleurs.
"C'est une guerre médiatique entre le Qatar et l'Arabie
saoudite", affirme le journaliste palestinien Abdel Bari
Atwan, qui dirige à Londres le site d'information "Raï
Al-Yaoum". Et dans cette bataille, les Saoudiens peuvent
compter sur une chaîne concurrente, Al-Arabiya. "Les
uns défendent les islamistes, les autres sont contre",
ajoute Abdel Bari Atwan, en référence à
la crise ouverte par le retrait début mars par l'Arabie
saoudite, les Emirats arabes unis et Bahreïn de leurs ambassadeurs
du Qatar, soupçonné de déstabiliser la
région.
Outil diplomatique
Après avoir été pendant
des années une tribune pour les contestataires de tous
bords des régimes autoritaires du Maghreb et du Moyen-Orient,
Al-Jazeera s'est targuée d'avoir contribué au
Printemps arabe, retransmettant en direct les soulèvements
qui ont déjà provoqué la chute de quatre
autocrates.
Mais ses détracteurs jugent sa ligne éditoriale
trop favorable aux islamistes, y voyant parfois un outil au
service de la diplomatie du Qatar, qui a soutenu, directement
ou indirectement, les courants islamistes dans les pays du Printemps
arabe.
"Al-Jazeera,
qui est en baisse, reste une grande chaîne de télévision
arabe comme elle a gardé sa popularité" chez
une partie de l'opinion publique, estime cependant l'universitaire
émirati Abdelkhaleq Abdallah.
Pour
sa part, Mohamed El Oifi, un spécialiste des médias
et enseignant à l'université Paris-3, déplore
"la volonté du nouveau gouvernement égyptien
de faire taire Al-Jazeera (...) qui reste au quotidien au coeur
du dispositif médiatique qui accompagne les processus"
de changement dans le monde arabe.
"En Egypte, en Syrie et aujourd'hui en Irak, elle continue
à donner la parole aux forces qui poussent vers le changement
politique au grand dam des partisans du statu-quo, de la stabilité
et de la contre-révolution", estime-t-il.
Dans
le passé, la chaîne a déjà eu des
démêlés avec les régimes arabes qu'elle
irritait par sa couverture souvent jugée impertinente
ou orientée, et Washington l'avait présentée
comme un porte-parole des groupes extrémistes. D'autant
que l'ancien chef d'el-Qaëda, Oussama ben Laden lui réservait
l'essentiel de ses messages.
Al-Jazeera, qui avait établi sa réputation par
une couverture presque exclusive des premiers jours de la guerre
en Afghanistan, à l'automne 2001, dispose aujourd'hui
de plus de 65 bureaux à travers le monde et compte plus
de 3.000 employés, dont quelque 400 journalistes d'une
soixantaine de pays.
AFP/L'Orient-le-Jour/Beyrouth
24 Juin 2014
Nous attirons votre attention sur la reprise fréquente,
notamment par la presse arabe francophone, d'articles ou dépêches
intialement rédigés par les agences internationales
de presse dont les auteurs ne sont donc pas toujours de culture
arabe.
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