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Bienvenue sur VISIONS ARABES.
Vu de France et d'Occident en général, le monde arabe apparait
souvent bien compliqué et irrationnel tant dans son fonctionnement
que dans l'enchainement et le rythme temporel des évènements.
Visions Arabes a pour but principal d'apporter
un éclairage original prioritairement
à travers des analyses et opinions de spécialistes issus
du monde arabe lui-même.
Comme, le plus souvent, celles-ci sont issus de la presse ou de la blogosphère
arabe,
il est nécessaire d'en saisir les subtilités grâce
à une maitrise absolue de la langue arabe. Leurs auteurs peuvent
vivre sur place ou être "exilés" en Occident ou
même ailleurs.
Voilà pourquoi Visions Arabes propose
de développer une interactivité entre la connaissance de
la langue et des opinions averties venues le plus souvent d'Orient.
Le
Jihad selon l'Etat Islamique ou la force du droit musulman
Dans un article du quotidien libanais al-Akhbar (n° 2382 du
1er septembre 2014), le journaliste Ridwan Murtada raconte les
suites de la décapitation du premier soldat libanais capturé
quelques jours plus tôt par lÉtat islamique,
dans une bourgade libanaise à la frontière de la
Syrie. Ce malheureux soldat était musulman sunnite. Deux
autres soldats (mais chiites) furent ensuite décapités.
Lire cet article en arabe
Ridwan Murtada explique que, dans les milieux de lÉtat
islamique, un soldat sunnite de larmée libanaise
est réputé apostat [donc ayant renié sa foi]
du simple fait quil sert un État national dont le
chef est chrétien, qui plus est dans une armée multiconfessionnelle
placée sous lecommandement dun général
chrétien. Par conséquent, pour lÉtat
islamique, cette armée est assimilée à une
armée de Croisés. Dans ces conditions, u n musulman
sunnite qui sert cette « armée de Croisés
» est un apostat qui a renié sa foi.
En revanche, explique Ridwan Murtada, le soldat chiite de
la même armée libanaise nest pas un apostat
aux yeux de lÉtat islamique. Un tel soldat, né
dans une autre foi que lIslam sunnite, est un infidèle
de naissance, un mécréant qui a ignoré lappel
à la vraie religion, à savoir lislam sunnite.
Un chrétien ou un israélite sont également
des infidèles, des mécréants qui ont ignoré
lappel à la vraie religion prônée par
lÉtat islamique, lIslam sunnite radical.
Or, sur la foi dun verset du Coran, la sanction de mort
doit être appliquée dabord àlapostat,
ainsi que lont affirmé à Ridwan Murtada les
milieux sunnites proches de lÉtat islamique. Linfidèle
subira la même sanction, mais après lapostat.
Ces mêmes milieux proches de lÉtat islamique
rappellent, du reste, que le premier calife (Abu Bakr) se détourna
un instant de la guerre quil faisait aux tribus infidèles
(celles qui
navaient jamais adhéré à lIslam)
pour régler leur compte aux tribus qui, à la mort
du Prophète, se détournèrent de lIslam
quelles avaient auparavant adopté, se rendant ainsi
coupables du crime dapostasie. Cest en ces termes
que les milieux proches de lÉtat islamique résument
leur
position (traduction): Le musulman sunnite
est un apostat (qui a renié sa religion) alors que le musulman
chiite est un mécréant (qui a ignoré
lappel à la vraie religion), et la sanction à
lencontre du premier passe avant la sanction à lencontre
du deuxième.
Pour se référer à des faits similaires
qui se sont déroulés en Occident, nous nous sommes
intéressés à la célèbre affaire
Mohammed Merah qui secoua la France durant la campagne électorale
présidentielle de 2012. C'est ainsi qu'en en mars 2012,
Mohammed Merah assassine dabord un militaire français
à Toulouse ; quelques jours plus tard, il assassine deux
autres militaires à Montauban ; et, quelques jours plus
tard, il sen prend à une école juive et y
assassine quatre civils.
Larticle de Wikipédia qui relate ces trois fusillades
précise que :
« La piste de la motivation raciste est évoquée
avant et après la troisième fusillade, celle de
l'école juive : les deux [militaires] tués sont
d'origine maghrébine et le blessé est antillais.
» Ce que larticle ne relève pas, en revanche,
cest lordre des assassinats : le tueur sen prend
dabord à des Arabes musulmans*
avant de sen prendre à des israélites.
>>
Lire l'article complet de Wikipédia
Dans les deux cas que nous venons dévoquer, au Liban
et en France, nous constatons le même ordre dans la sanction
: le musulman sunnite coupable dapostasie est « sanctionné
» avant le musulman non sunnite, lisraélite
ou le chrétien coupable de mécréance. Dans
les deux cas, aux yeux de lÉtat islamique, la sanction
est la mise à mort, mais cette sanction sera appliquée
dabord à lapostat puis au mécréant,
car lapostasie est plus grave que la mécréance.
Notons à ce stade la principale différence entre
larticle de Wikipédia qui relate les assassinats
de Mohammed Merah et larticle dal-Akhbar qui relate
la mise à mort des militaires libanais :
Wikipédia écrit : «
La piste de la motivation raciste est évoquée avant
et après la troisième fusillade, celle de l'école
juive : les deux [militaires] tués sont d'origine maghrébine
et le blessé est antillais. » Cest donc avec
des concepts occidentaux que lon essaie de décrypter
lévénement ;
Ridwan Murtada, en revanche, constate
quil y a un ordre dans lapplication des sanctions
et en recherche les causes dans la pensée propre aux auteurs
des assassinats. Ridwan Murtada écrit, en citant les milieux
islamistes proches de lÉtat islamique, que sur la
foi dun verset du Coran, la sanction de mort doit être
appliquée dabord à lapostat. Linfidèle
subira la même sanction, mais après lapostat.
Ces mêmes milieux rappellent du reste que le premier calife
(Abu Bakr) se détourna un instant de la guerre quil
faisait aux tribus infidèles (celles qui navaient
jamais adhéré à lIslam) pour régler
leur compte aux tribus qui, à la mort du Prophète,
se détournèrent de lIslam quelles avaient
auparavant adopté,
se rendant ainsi coupables du crime dapostasie.
Doù vient dans la réalité
de cet ordre dans lapplication de la sanction ?
Ibn Taymiyya (personnage abordé lors
de notre article du mois
dernier traitant des fondements du jihad) est un docteur
de la loi, musulman sunnite et syrien, né en 1263 et mort
en 1328.
Dans son traité sur le jihad , Ibn Taymiyya lance une fatwa
(cest-à-dire un avis juridique) dans laquelle il
affirme que « la sanction qui frappera lapostat sera
plus lourde que celle qui frappera le mécréant dorigine
». Ainsi, lapostat, guerrier ou civil, sera mis à
mort ; en revanche, seul le mécréant qui combat
les musulmans sera mis à mort, tandis que le mécréant
non-combattant aura la vie sauve.
Il parait donc assez clair que cest en priorité dans
le droit musulman, notamment le droit du jihad, quil convient
de rechercher lexplication de ces nuances afin de saisir
la signification dévénements qui,
autrement, resteraient flous ou explicités sous un angle
biaisé et avec des visées socio-politiques.
Jean-Michel
DRUART & César SAKR 9
décembre 2014 *Il
s'est avéré qu'en réalité l'une des
trois victimes présentées comme musulmane à
cause, sans doute, de la consonnance de son identité était
en réalité chrétienne, ce qui ne change pas
ici le sens réel de notre démonstration >>
Lire...
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