La TVA au Liban,
de 2002 à 2004
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Création de la TVA
au Liban
Taxe sur la Valeur Ajoutée
Abaissement du seuil
d’assujettissement prévu pour Mars 2004
Les commerçants de Beyrouth contestent
la baisse du seuil d’assujettissement obligatoire à la TVA à
150 millions de livres de chiffres d’affaires soit 100.000 USD
et appellent le ministère des Finances à épargner les petits
commerçants, principale catégorie concernée. Dans une étude
détaillée qu’il a soumise au ministre Fouad Siniora, le secrétaire
de l’Association des commerçants de Beyrouth, Mounir Tabbara,
estime que l’assujetissement des petits commerçants à la TVA
« ne sera pas rentable pour le Trésor ». Il explique que les
coûts financiers qu’auront à supporter cette catégorie de commerçants
ainsi que la direction de la TVA chargée de gérer les relevés
des nouveaux contribuables seront de loin supérieurs à ces recettes.
Mettant en garde contre les répercussions négatives de ce problème
sur l’économie nationale, M. Tabbara appelle le ministre à trouver
au plus vite une solution, d’autant plus que le délai maximum
pour la demande d’enregistrement auprès de la direction de la
TVA a été fixé au 28 février 2004.
TVA : Le point sur les formalités
d'enregistrement,
les déclarations et le paiement...
À partir du 1er janvier 2004,
toute personne ou entreprise ayant enregistré au cours de l’année
2003 un chiffre d’affaires de 150 millions LL (contre 250 millions
LL précédemment) sera obligatoirement assujettie à la TVA. Cette
mesure est supposée, selon le ministère des Finances, assurer
une concurrence plus équitable sur les marchés, au-delà de ses
recettes prévues.
Formalités d’enregistrement
Les personnes ou entreprises
concernées devront se faire enregistrer auprès de la direction
de la TVA avant fin février 2004. Le chiffre d’affaires à prendre
en compte englobe : - Les opérations soumises à la TVA. - Les
opérations exemptées de la TVA. - Les opérations exemptées de
par leur nature de la TVA mais donnant droit à la restitution,
comme l’exportation par exemple. Les formulaires d’enregistrement
sont disponibles auprès de la direction de la TVA (ministère
des Finances, Corniche du Fleuve, Beyrouth, ou sur le site Internet
www.finance.gov.lb). Après approbation de la demande d’enregistrement,
l’administration concernée émettra une attestation indiquant
le numéro du contribuable et la date à partir de laquelle ce
contribuable doit payer la TVA exigible et se faire restituer
la taxe payée sur ses achats. Le non-enregistrement ou le retard
dans l’enregistrement conduit à l’imposition d’une amende d’un
million de LL auquel il faut ajouter tous les arriérés – montants
et intérêts.
Processus ultérieur
Une fois en possession de ce certificat, le contribuable devra
: - Tenir des livres comptables journaliers. Les contribuables
imposés sur base du revenu estimé ou forfaitaire peuvent continuer
à déclarer leurs bénéfices sur cette même base pour l’impôt
sur le revenu. - Émettre des factures conformes aux dispositions
de la loi sur la TVA. - S’assurer que les factures d’achat sont,
elles aussi, conformes aux dispositions de cette loi, et ce
afin de pouvoir bénéficier de la restitution de la TVA. En ce
qui concerne les entreprises qui ne peuvent, de par la nature
de leurs activités, émettre en permanence des factures (magasins,
épiceries…), le reçu TTC fait foi. Il leur faudra cependant
obtenir l’approbation préalable de la direction de la TVA.
Déclaration et paiement
Actuellement, la déclaration et le paiement se font tous les
trimestres. La direction de la TVA envoie le formulaire de déclaration
qui inclut les délais de paiement, par la poste, au contribuable.
Ce dernier se doit de remplir le formulaire et de le renvoyer
dans un délai de 20 jours à dater de la fin du trimestre. Au
cas où le contribuable n’aurait pas reçu son formulaire de déclaration,
il devra se renseigner auprès de la direction de la TVA. Les
déclarations remplies peuvent être envoyées par la poste et
les paiements effectués auprès des banques. La déclaration et
le paiement sont deux opérations indépendantes, l’une n’annulant
pas l’autre. La non-déclaration entraîne l’imposition d’une
amende de 10 % du montant de la TVA pour chaque mois de retard
(minimum 500 000 LL). L’amende de non-paiement est de 3 % par
mois du montant à régler. Il est donc dans l’intérêt de tout
contribuable de présenter sa déclaration même si, pour une raison
ou pour une autre, il ne peut payer la TVA dans les délais.
Rosemonde Hatem - Le Commerce du Levant
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Après la mise en place de la TVA depuis le 1er Février
2002, le Liban lance à compter du 22 Juin 2002, le système
de Remboursement de la TVA sur les achats pour les Visiteurs, Touristes
et non-résidents en Général.Ce nouveau service
de promotion des Ventes pour les commerçants mais aussi du tourisme
au Liban est géré par une société Suédoise:
Global Refund Liban
Pour plus de détails, notre Dossier spécial >>>>
>>> Retour
sur le " Le Jour J "
Le 1er
Février 2002, la TVA entre en vigueur...
Dossier En collaboration avec
La journée du 1er février 2002 restera dans l’histoire
économique et financière du Liban comme celle d’un tournant crucial, d’une date
historique marquant l’entrée du pays dans une nouvelle ère, celle de la taxe à
la valeur ajoutée, une voie sur laquelle tous les États développés se sont lancés
il y a bien des années déjà.
Cette véritable révolution dans la comptabilité nationale que représente l’introduction
de la TVA portera-t-elle ses fruits ? Le gouvernement pourra-t-il relever le défi
qu’il s’est lancé à lui-même ? Les quelques prochaines semaines permettront de
savoir si l’Exécutif est à la hauteur de cette bien difficile épreuve. Pour l’heure,
le Conseil des ministres, réuni hier sous la présidence du chef de l’État, a décidé
une série de réductions des taxes douanières pour compenser l’effet inflationniste
de la nouvelle taxe. Pour leur part, les contribuables semblaient espérer jusqu’à
la dernière minute un report de la taxe. Leur scepticisme les a conduits à retarder
jusqu’à la dernière minute les formalités d’enregistrement. Résultat, les nouveaux
locaux de l’administration ont été assaillis au cours des deux derniers jours
et les quelque 130 fonctionnaires des Finances ont veillé jusqu’à minuit pour
traiter les demandes d’immatriculation dans les délais. Plus de 6 400 demandes
avaient été déposées hier matin, alors que l’administration en attend au total
entre 7 000 et 8 000.
La TVA représente un grand changement dans les habitudes comptables des entreprises
libanaises qui vont devoir se familiariser avec les factures. Mais l’introduction
de la TVA se traduira aussi par une augmentation des prix à la consommation que
le gouvernement estime à 5 %.
Quel impact sur les secteurs de l’alimentation et du tourisme
?
Les hausses seront variables en fonction des produits et des services
A compter du 1er février 2002, les prix vont renchérir
à cause de l’entrée en vigueur de la TVA. Quelle sera l’ampleur de l’inflation
? Personne ne le sait avec exactitude. Le ministère des Finances table sur une
hausse générale des prix de 4,5 %. La hausse sera, plus précisément, de 3,69 %
pour les ménages à faibles revenus et de 5,38 % pour les ménages aux revenus plus
élevés. La différence s’explique par le fait que les produits exemptés représentent
plus de 55 % de la consommation des ménages à faibles revenus, alors que leur
part est inférieure pour les ménages à revenus élevés. Mais certains économistes
et fiscalistes jugent optimiste l’estimation du ministère et penchent plutôt pour
une augmentation des prix variant entre 8 et 12 %.
L’économiste Élie Yachoui justifie ces estimations par le fait que les quatre
produits le plus couramment consommés que sont l’essence, le tabac,
les boissons et les véhicules n’échappent pas à la TVA et sont par ailleurs soumis
à des taxes élevées. En fait, la hausse des prix variera d’une activité à
l’autre en fonction des exemptions – nombreuses – accordées par la loi. Les professionnels
du secteur de la distribution alimentaire et ceux de la restauration et de l’hôtellerie
estiment par exemple entre 5 et 6 % l’effet inflationniste dans leur domaine.
Selon Chaouki Bou Khalil, directeur commercial du groupe Bou Khalil Markets et
président du syndicat des supermarchés, la TVA grévera le pouvoir d’achat des
consommateurs de près de 6 %.
«Ce taux est une moyenne, le panier de la ménagère se composant aussi bien de
produits alimentaires de base exemptés que de produits taxés à 10 %», explique-t-il.
Les clients aux revenus les plus faibles ont davantage tendance à consommer des
produits de première nécessité qui sont exemptés comme le pain,
la farine, la viande, les poissons, le lait et les produits laitiers, le riz,
le sucre, le sel, les produits agricoles non industrialisés, la volaille et
les produits qui y sont assimilés. Leur pouvoir d’achat devrait être relativement
moins affecté par l’introduction de la TVA. En revanche, les clients les plus
fortunés, achètent relativement plus de produits assujettis à la nouvelle taxe.
Ils subiront donc davantage l’augmentation des prix.
En fin de compte, «le consommateur à revenu moyen va souffrir d’autant plus que
son salaire ne suivra pas l’augmentation du coût de la vie», conclut M. Bou Khalil.
En revanche, le client d’une épicerie de quartier risque d’être davantage exposé
à une hausse des prix, quel que soit son niveau de revenu. L’épicier aura en effet
tendance à augmenter de 10 % les prix de tous ses produits, qu’ils soient assujettis
ou exemptés. Car le petit commerçant est considéré comme un consommateur final
(dans la mesure où son chiffre d’affaires n’atteint pas les 150 millions LL, seuil
facultatif d’assujettissement). Il répercute donc sur ses prix la TVA qu’il a
payée à ses fournisseurs et qu’il n’a pas la possibilité de récupérer.
En ce qui concerne les prix pratiqués par les
restaurants et les hôtels, ils devraient augmenter de façon plus
ou moins importante. Pour le restaurateur assujetti à la TVA, la nouvelle taxe
de 10 % remplace la redevance gouvernementale de 5 %. Ce qui implique une hausse
des prix à la consommation de 5 %. En revanche, pour le restaurateur dont le chiffre
d’affaires est inférieur à 150 millions de LL, la hausse des prix devrait être
plus importante. Non seulement il reste redevable de la taxe gouvernementale de
5 %, mais il doit également s’acquitter de la TVA sur ses achats sans pouvoir
la récupérer. Il doit donc répercuter ces montants sur ces prix à la vente. Dans
le segment du secteur hôtelier où la concurrence est rude, les clients devraient
être heureusement surpris en ce qui concerne les prix, explique Pierre Achkar,
président de l’Association des hôtels libanais. Afin de rester compétitifs, les
hôteliers auront en effet tendance à assumer eux-mêmes la différence entre l’ancienne
taxe de 5 % et la TVA de 10 %, afin de ne pas augmenter la facture pour le client.
Mais les hôtels les moins exposés à la concurrence, comme le Phoenicia Inter-Continental
ou le Mzaar Inter-Continental, n’hésiteront pas à répercuter la TVA sur le prix
de la nuitée. C’est en tout cas l’explication donnée par le directeur financier
d’un grand hôtel. «De notre point de vue, nos recettes n’augmentent pas, mais
le consommateur devra payer 10 % en plus».
Carine ABOU LAHOUD
28 Janvier 2002
Quelques mois après la baisse des taxes douanières
et à l'aube de l'annonce de la signature de l'Accord d'Association entre
le Liban et l'Union Européenne, s'ouvrait en Décembre une session
parlementaire largement consacrée à l'introduction de la TVA.
Il s'agit d'un aspect-clé de la réforme économique, sans
doute nécéssaire sur le plan intérieur mais aussi largement
imposée de l'extérieur pour affirmer l'arrimage formel de l'économie
Libanaise à l'économie mondiale.
Si dans l'ensemble, cette nouveauté est relativement admise sur le principe,
nombreuses sont les propositions émanant du monde économique, relatives
à sa mise en oeuvre et ses aménagements concrets.
Il y a donc fort à parier que de nombreux amendements résulteront
des travaux parlementaires surtout lorsqu'on connait le clientélisme qui
caractérise la vie politique Libanaise.
Le Projet avant le débat
au Parlement
La TVA en quelques mots
:
Il s'agit d'une majoration des prix appliquée à
toute vente sur les biens et services qui y sont assujetis.Les produits perçus
sur les encaissements sont ensuite reversées à l'Etat après
déduction pour les entreprises et les commercants, bien sûr, des
sommes relatives aux décaissements relatifs à leurs achats sur lesquels
ils auront du eux-aussi s'acquitter de la TVA.
Voilà donc pour ce bref mais nécéssaire rappel pédagogique.
Cette
taxe à la valeur ajoutée a été unifiée, à 10 %, sur les produits et autres services
non exemptés.
Sont exemptés :
Les assurances, les banques, le secteur de la santé, le secteur
pédagogique (les écoles), ainsi que les produits de première nécessité – pain,
lait, huile, etc.
Notez qu'un dispositif sera rapidement mis en place pour permettre, comme en Europe,
le remboursement de cette TVA aux touristes attestant de leur non-résidence
au Liban,qu'ils soient libanais ou non.Voilà au moins une autre bonne nouvelle...
Selon le gouvernement Hariri, cette TVA va provoquer, la première année, une inflation
moyenne de 4,5 %. Une inflation qui sera résorbée dans douze mois, selon les estimations
du ministre des Finances, Fouad Siniora.
La TVA aurait dû entrer en vigueur le 1er janvier 2002. Sauf que cette date a
été reculée d’un mois, jusqu’au 1er Février prochain, à cause,
tout naturellement, des récriminations des commerçants. Ceux-ci, malgré ce répit
de quatre semaines accordé par le gouvernement, ne comptent pas s’arrêter là,
continuant de réclamer trois mois de délai.
Petit historique :
C’est le précédent ministre des Finances Georges Corm, qui avait
initié le projet de la TVA pour, en gros, réduire les taxes douanières qui assurent
50 % du financement du budget de l’État. Un chiffre inadmissible selon bon nombre
d’analystes, au regard notamment de la candidature de Beyrouth à l’OMC, et inadmissible
si le Liban veut doper ses exportations vers les marchés étrangers. Fouad Siniora
a repris presque stricto sensu le projet de son prédécesseur, sauf qu’il a prévu
d’élargir la base des contribuables – des entreprises – concernés par la nouvelle
taxe : de 5 000, ils sont passés à 12 000. Notons enfin que le ministre des Finances,
à l’arrivée au pouvoir de Rafic Hariri l’an dernier, avait renvoyé la TVA aux
oubliettes, la considérant par trop obsolète et voulant la remplacer par une taxe
sur les ventes comme aux États-Unis. Sauf que depuis… Dans tous les cas, les milieux
autorisés disent que cette TVA version Siniora ne devrait pas poser de problème
pour être approuvée : les blocs Berry et Joumblatt sont d’accord. Reste le Hezbollah,
que l’arrivée d’une nouvelle taxe pourrait, dit-on, rebuter.
Les revendications du monde économique
Le secteur des Assurances
L’Acal réclame l’amendement de l’article 16
L’Association des compagnies d’assurances au Liban (Acal) a adressé
au ministre des Finances Fouad Siniora un mémorandum dans lequel elle l’invite
à apporter certains amendements à l’article 16 de la loi sur la Taxe sur la valeur
ajoutée (TVA) dans le but de préserver les intérêts et surtout l’équilibre financier
des sociétés d’assurances. L’article 16 de la législation sur la TVA, rappelle-t-on,
énumère les domaines et services qui sont exemptés de l’imposition, dont le secteur
des assurances. L’Acal réclame que le texte de l’article 16 soit plus clair concernant
la définition du secteur de l’assurance. Celui-ci, lit-on dans le mémorandum,
devrait englober tous les instruments de preuves des dégâts et des documents nécessaires
pour évaluer les indemnités. Ces documents sont, à titre d’exemple, les rapports
des experts nécessaires pour déterminer les risques de l’assuré et la valeur des
indemnités, les factures émises par des sociétés ou des compagnies qui s’occupent
de la réparation des dégâts qui découlent de risques couverts des accidents de
voitures, des incendies et des effondrements.
Le secteur des Médias audiovisuels
Opposition des représentants des médias audiovisuels
Les représentants des médias audiovisuels ont débattu hier, lors
d’une réunion, de la question de l’impact de la TVA sur les publicités, se demandant
par ailleurs comment l’État impose de nouvelles taxes alors qu’il prétend œuvrer
à encourager les investissements. Pour être plus clair, souligne le communiqué,
les revenus publicitaires des chaînes de télévision au Liban escomptés pour 2001
sont de l’ordre de 40 millions de dollars, chiffre qui tomberait à 24 millions
après prélèvement des commissions des agents et régies publicitaires. La TVA devrait
absorber quatre autres millions de dollars et les recettes nettes des neuf télévisions
ne seront plus que de 20 millions de dollars, une somme avec laquelle il sera
impossible de faire fonctionner les chaînes. Les représentants des médias audiovisuels
se demandent si la mise en œuvre de la TVA ne vise pas à fermer les médias et
à envoyer dans la rue leurs employés.
Le secteur du Commerce de détail
Les commerçants de Beyrouth pour une application graduelle
L’Association des commerçants de Beyrouth s’est réunie le 3 Décembre
2002 et a exprimé son inquiétude face aux difficultés et aux nombreux dangers
que devrait générer la mise en œuvre de la TVA, appelant les responsables à trouver
les solutions qui s’imposent pour la faire réussir. L’association s’est demandée
si l’État avait prévu les modalités et mécanismes nécessaires pour régler le problème
des évasions devant le fisc que l’imposition de cette taxe va créer. L’Association
des commerçants de Beyrouth a préconisé une application graduelle de la TVA qui
permettrait tant au citoyen qu’aux commerçants de s’y adapter. Une TVA de 3% sera
appliquée lors de la première année, de 6% la deuxième année et de 10% la troisième
année.
Il est donc clair qu'il reste encore quelques
péripéties et rebondissements avant l'entrée en vigueur de
la mesure dans la vie quotidienne des Libanais.Néammoins, le projet ne
devrait finalement pas être vidé de sa substance tant la résorbtion
des déficits publics est au coeur de la situation économique du
pays et de sa notation sur le plan international
Cela n'ira pas sans tiraillements et quelques
sacrifices, seulement temporaires espèrons-le, mais de cela, la société
civile Libanaise est habituée et même blasée...
Jean-Michel DRUART
Le Dossier
de la TVA avec
Article du 6 Décembre 2001 suite
au débat et au vote parlementaires.
Considéré comme l’un des principaux éléments du projet
de réforme économique et fiscal du gouvernement, le projet de loi sur la TVA (au
taux fixé à 10 %) a été voté hier, place de l’Étoile. Quinze députés ont dit «non»
à la nouvelle taxe qui doit entrer en vigueur le 1er février 2002 et six parlementaires
se sont abstenus pour diverses raisons liées principalement à ses éventuels effets
économiques et sociaux. À l’instar des commerçants farouchement hostiles à l’application
de la TVA, les députés opposés à la loi jugent qu’elle aggravera le marasme économique,
provoquera une inflation et alourdira le poids des problèmes socio-économiques.
Non pas qu’ils contestent le principe de ce nouveau système fiscal, adopté en
prévision de la signature d’un accord d’association avec l’UE et de l’adhésion
du Liban à l’OMC, mais ils pensent qu’il aurait dû être progressivement institué,
parallèlement à une abolition progressive des droits de douane. Le ministre des
Finances a tenté de balayer leurs craintes en annonçant d’autres mesures censées
neutraliser les effets négatifs de la TVA et de stimuler l’économie, mais les
craintes persistent.
TVA - Une minorité de députés critique la loi, mais Siniora affirme
qu’elle sera bénéfique
Une arme à double tranchant
La Chambre a voté hier (par 65 voix – chiffre non officiel) le
projet de loi instituant la Taxe sur la valeur ajoutée – qui doit entrer en vigueur
le 1er février 2002 – en dépit de fortes réserves exprimées toutefois par une
minorité de parlementaires. Au moment du vote, ils ont été quinze à exprimer leur
opposition au nouveau système fiscal et six à s’abstenir mais seulement une dizaine
de députés avaient critiqué le texte durant le débat, jugeant qu’il est de nature
à aggraver le marasme économique, à entraîner une inflation et à accroître les
problèmes socio-économiques auxquels la population est confrontée. Un fait à relever
: ils n’ont pas été démentis par le ministre des Finances, Fouad Siniora, qui
a reconnu l’effet inflationniste et économiquement ralentissant de la TVA, mais
qui a déclaré qu’elle fait partie d’un train de mesures économiques et fiscales
à même de neutraliser ces effets négatifs et de stimuler l’activité économique
dans le pays.
Le débat autour de la TVA s’ouvre en l’absence du chef du gouvernement,
Rafic Hariri, ce qui fait craindre le pire à plusieurs parlementaires. Ces derniers
redoutaient une bouderie du président du Conseil qui était sorti mardi de l’hémicycle,
sans attendre la fin de la réunion, pour protester contre une décision de M. Nabih
Berry de renvoyer au gouvernement le projet de loi autorisant l’État à signer
un accord de prêt de 200 millions de dollars destinés à l’achat de fuel pour le
compte de l’EDL. M. Hariri avait jugé injustifiée la raison fournie par le président
de la Chambre (l’absence de la signature du ministre des Affaires étrangères)
pour renvoyer le projet de loi. Le chef du gouvernement fait irruption dans l’hémicycle
au moment où le débat bat son plein. Farouchement, MM. Boutros Harb, Youssef Maalouf,
Nicolas Fattouche, Hussein Husseini, Ali el-Khalil, Georges Dib Nehmé, Fayçal
Daoud critiquent le projet du ministère des Finances, tandis que MM. Abdallah
Farhat, Salah Honein, Gebrane Tok et Mme Nayla Moawad expriment des réserves sur
le texte.
«Pourquoi a-t-on fixé dès le départ un taux de 10 % pour la TVA
?
Pourquoi ne l’a-t-on pas appliquée progressivement pour arriver
aux 10% en réduisant graduellement aussi les taxes douanières, afin de parvenir
à un équilibre entre les deux systèmes ?», demande M. Boutros Harb. C’est là un
point que plusieurs parlementaires abordent mais qui est resté flou dans les réponses
de M. Siniora. Ce dernier fait état d’une réduction progressive des droits de
douane depuis l’année dernière, mais il ne dit pas dit si les taxes douanières
seront abolies avant la mise en vigueur de la TVA ou si une double imposition,
redoutée par des députés comme MM. Harb, Honein, Khoury ou Farhat, est à envisager.
M. Harb met aussi en doute les estimations du ministère des Finances concernant
les recettes de la nouvelle taxe (800 milliards de livres), en l’absence de statistiques
fiables. Ce point est aussi soulevé par M. Youssef Maalouf qui, à l’instar de
M. Boutros Harb et de tous les députés qui ont dit non au nouveau système fiscal,
juge que le projet du gouvernement est de nature à accentuer les problèmes socio-économiques
de la population. Il précise, à coups de nombreux exemples, que les pays où l’institution
de la TVA s’est avérée être un échec sont beaucoup plus nombreux que ceux où ce
système a réussi. Il cite entre autres, le Gabon et la Tunisie «où près de 63
entreprises ont fait faillite» et relève qu’au Liban, la TVA sera appliquée à
près de 7 000 entreprises sans qu’on n’ait songé à leur pouvoir compétitif. «Les
résultats de l’institution de cette taxe ne sont pas garantis», martèle-t-il,
en insistant sur l’absence de statistiques et sur le nombre «insuffisant» des
inspecteurs fiscaux, «au nombre de 250, ce qui signifie qu’un inspecteur doit
contrôler dans le meilleur des cas deux entreprises par jour».
« Pourquoi 2002 et pas 2004 ? »
Après avoir souligné que le taux de 10 % est fictif «car le taux
cumulé effectif atteindra les 28 %», M. Maalouf s’interroge, comme Mme Moawad,
sur les raisons pour lesquelles le Liban ne prend pas exemple sur la Syrie et
n’institue pas la TVA en 2004 au lieu de 2002. C’est le leitmotiv de la séance
: gare à toute précipitation qui coûtera cher au Liban. «La France a mis cinq
ans à étudier cette taxe puis elle s’est donné un délai de trois ans pour l’appliquer»,
relève M. Ali el-Khalil. Il faut quand même préciser que les détracteurs du projet
ne sont pas opposés au principe de la TVA mais s’inquiètent du mécanisme d’application
qui leur semble brumeux. M. Fattouche note ainsi que l’article 45 du texte est
une atteinte au secret bancaire, dans la mesure où il impose aux contribuables
de soumettre aux inspecteurs tous les documents prouvant qu’ils ont versé le montant
de la taxe. Mme Moawad demande à savoir ce que le gouvernement a prévu pour la
détaxe dont bénéficient les étrangers ou pour les accords de coopération bilatérale
dans lesquels les prix de certaines marchandises sont fixés. Pour défendre le
projet, seuls prendront la parole MM. Sélim Saadé, Antoine Haddad et Walid Eido
qui soulignent que la TVA «introduit un nouveau concept fiscal équitable au Liban
et bénéficie aux petites entreprises». Mais M. Saadé fait quand même remarquer
que la nouvelle taxe est loin de favoriser le règlement des problèmes financiers
de l’État. «Elle permettra au gouvernement de respirer pendant un ou deux ans,
en lui assurant de quoi payer le service de la dette l’année prochaine», note-t-il.
La réponse de Siniora
C’est au tour de M. Siniora de répondre : il commence par placer
le projet de loi dans le contexte des mesures adoptées par le gouvernement pour
favoriser un redressement économique et opérer une réforme fiscale. Son application,
ajoute-il, sera suivie d’une autre démarche, celle de l’institution de l’impôt
unifié sur le revenu. Le ministre reconnaît qu’elle accentuera le marasme qui
sera réglé, dit-il, grâce à d’autres mesures qu’il n’a pas précisées et qui visent
à doper le secteur privé.
Concernant les droits de douane,
M. Siniora indique qu’à l’heure actuelle, 36 % des produits importés
sont exemptés de taxes, contre 47 % soumis à une taxe de 5 % et 17 % soumis à
une taxe supérieure à ce taux. Ce qui signifie que 64 % des importations sont
taxées. Mais M. Siniora ne dit pas si elles continueront de l’être après l’institution
de la TVA. Il explique que 70 % des recettes douanières proviennent de quatre
produits : l’essence, les voitures, les cigarettes et l’alcool «et de certaines
denrées qui peuvent concurrencer leurs équivalents locaux».
Il défend ensuite le caractère «équitable» de la nouvelle taxe
«qui n’est pas cumulative, contrairement à la taxe sur les ventes», avant d’indiquer
que la TVA réduit sensiblement le risque de fraude fiscale puisque son parcours
est suivi d’une façon systématique à partir de son importation jusqu’à la vente
finale. M. Siniora fait aussi remarquer qu’elle favorisera la production locale
et que la détaxe est prévue. Les Libanais vivant à l’étranger et ayant une carte
de séjour délivrée par le pays d’accueil en bénéficient. Le texte est ensuite
soumis au vote après l’échec d’une tentative de le renvoyer au gouvernement pour
un examen plus approfondi. Il obtient la majorité parlementaire, constituée principalement
des trois blocs Berry, Hariri et Joumblatt et est rejeté par vingt et un députés.
La réunion est levée après l’approbation de huit textes de lois dont un projet
de loi régularisant la situation des contribuables en retard de paiement de l’impôt
sur le revenu depuis 1992 jusqu’en 1999, et une proposition de loi autorisant
l’importation de moteurs usagés vieux de plus de dix ans pour les véhicules roulant
à l’essence.
La nouvelle taxe en quelques lignes:
La TVA est, comme on le sait, un impôt sur la
consommation qui se calcule par un pourcentage appliqué au prix de vente et fixé
par le gouvernement à 10 %. La loi votée hier prévoit d’appliquer la taxe à toutes
les opérations de ventes menées par des personnes imposables, physiques ou morales,
à condition que leurs chiffres d’affaires annuels soient supérieurs à 500 millions
de livres et aux importations. Elle prévoit toutefois une série d’exemptions,
dont les opérations portant sur des biens-fonds non construits ou menées par les
autorités publiques, même si elles sont lucratives, à l’exception de la série
suivante : la location de propriétés privées, les télécommunications, l’eau et
l’électricité, les médias audiovisuels, les marchés de consommation, les abattoirs
et les dépôts, le tabac et le tombac, les parkings, les ports et les aéroports
et les coopératives. La TVA ne s’applique pas sur les activités suivantes : les
services assurés par les médecins, les professions paramédicales et les hôpitaux,
l’assurance et la réassurance et les prestations médicales assurées par les mutuelles
et le patronat, les services bancaires et financiers, les activités des associations
à but non lucratif, les transports publics, la loterie et les jeux de hasard,
la vente ou la location de biens-fonds construits, les activités agricoles, le
transfert de fonds, l’importation d’objets personnels et les équipements militaires.
Elle ne s’applique pas non plus sur les produits suivants : le bétail, les volailles
et les poissons vivants, les produits agricoles non traités, le pain, la farine,
les viandes et les poissons, le lait et tous ses dérivés, le riz, le blé concassé,
le sel, les huiles végétales, les pâtes et les produits alimentaires pour bébés,
les livres, les revues, les journaux, le papier et le carton réservé à l’écriture
ou à l’impression, le papier journal et l’encre destinée à l’imprimerie, les timbres
de poste et fiscaux, la monnaie, le gaz butane, les graines, les engrais, le fourrage
et les pesticides, les machines agricoles, les médicaments et les produits pharmaceutiques,
les équipements médicaux, les pierres précieuses et semi-précieuses, les perles,
le diamant, l’or, l’argent et tout métal précieux, les yachts et les bateaux de
plaisance appartenant à des non-Libanais. Un appareil administratif est mis en
place pour gérer la TVA. Il est formé de quatre départements dont un qui est chargé
des investigations sur le terrain.
Six abstentionnistes et quinze opposants
Six députés se sont abstenus lors du vote et quinze ont dit non
au projet de loi sur la TVA. Les six sont MM. Ibrahim Bayan, Georges Najm, Mohammed
Fneich (bloc Hezbollah), Nehmetallah Abi Nasr, Nazem Khoury et Maurice Fadel.
Les quinze opposants sont MM. Assem Kanso, Fayçal Daoud, Nader Succar, Nicolas
Fattouche, Élie Skaf, Hussein Husseini, Boutros Harb, George Kassarji, Youssef
Maalouf, Jihad Samad, Farid el-Khazen, Kassem Hachem, Abdel-Rahman Abdel-Rahman,
Mohammed Kabbara et Farès Souhaid.
Tilda ABOU RIZK
Fiscalité
- Une inflation moyenne de 4,5 % est prévue La TVA, une taxe moderne qui risque
d’accentuer la déprime économique
- Article du 20 Décembre 2001
-
La taxe sur la valeur ajoutée, ou la TVA, est
un mal nécessaire. Elle est nécessaire dans la mesure où son application répond
d’un côté aux soucis du Trésor qui a besoin d’augmenter ses revenus et de l’autre
aux exigences de la communauté internationale à la veille de l’adhésion du Liban
à l’accord d’association avec l’Union européenne et à l’OMC. La TVA est un mal
dans la mesure où son application sera douloureuse pour les ménages. C’est essentiellement
une taxe sur la consommation qui touchera tant les biens que les services. Son
entrée en vigueur affectera à la hausse les prix des produits et des services.
Même si cette hausse ne touchera les prix qu’une seule fois, comme se plaît à
le répéter le ministre des Finances Fouad Siniora, elle sera suffisante pour laminer
le pouvoir d’achat des ménages en l’absence de toute possibilité de majoration
quoique minime des salaires. De l’aveu même de certains ministres, l’entrée en
vigueur de cette taxe, prévue pour le 1/2/2002, produirait une inflation moyenne
de 4,5 %. À ceci s’ajoute le fait qu’à près de quarante jours du jour J, les mécanismes
d’application de cette nouvelle taxe restent brumeux. La série de décrets d’application
prévus par la loi sur la TVA approuvée la première semaine du mois en cours n’ont
pas encore été promulgués. Le concept de la TVA est celui d’une taxe moderne qui
va révolutionner les structures de l’imposition au Liban, disent les économistes.
Là où le bat blesse, ajoutent-ils, est que son introduction intervient dans une
conjoncture de déprime. Et, il y a un risque réel que son application contribue
à rendre la situation économique encore plus dépressive et de réduire la demande
sur la consommation déjà faible. D’où, l’importance à leur avis, d’une introduction
graduelle de la TVA, dont les taux appliqués auraient passé en trois ans de 5
à 10 %. Ces mêmes sources se montrent sévères dans leur jugement à l’égard du
gouvernement qui, au moment de sa formation, a été particulièrement critique vis-à-vis
de la mise en place du régime de la TVA, brandissant le slogan d’une relance de
l’économie par une réduction drastique des taxes douanières et des impôts. Les
notions d’équité et de justice de la TVA sont relatives. Il est cependant vrai
que cette taxe touche les produits et les services entraînant ainsi un élargissement
de la base fiscale et par suite une meilleure répartition du poids fiscal. Si
pour les produits, les classes aisées et moins nanties sont à la même enseigne,
pour les services c’est la classe des riches qui sera la plus touchée puisqu’elle
est grande consommatrice de services. Et le contrôle ? Ceci ne sera pas une sinécure.
Si le contrôle de la TVA sur les produits est relativement facile, il sera plus
compliqué en ce qui concerne les services. Dans ce dernier cas, l’évaluation de
la valeur ajoutée est difficile à quantifier et donc les chances d’évasion fiscale
sont plus importantes. Nul besoin de mentionner que les transactions en liquide
portant sur des services (le cash business) vont s’accroître après l’entrée en
vigueur du régime de la TVA. Il s’agit d’une mesure qui a prouvé son efficacité
dans d’autres pays qui ont opté pour la TVA, afin de contourner l’imposition.
Pour les entreprises, il n’y aura pas de double taxation. La TVA sera entièrement
à la charge du client final, alors que les sociétés s’acquitteront de l’impôt
sur le revenu fixé par l’ancien gouvernement de Sélim Hoss à 15 %.
La vente à tempérament étant courante à l’heure actuelle au Liban, les intermédiaires
risquent d’avoir un grand problème de liquidité. C’est que la TVA est due au moment
de la facturation, même si le montant total de la transaction n’est pas entièrement
versé.
Siniora : Rien que des avantages
Le ministre des Finances Fouad Siniora ne trouve que des avantages
à l’implantation du régime de la TVA. Selon lui, l’introduction de la TVA est
devenue un pas important et incontournable dans le plan d’action du gouvernement
visant à réformer le système fiscal, y compris la préparation à l’application
de la taxe globale sur le revenu individuel au Liban. En effet, le système fiscal
libanais actuel repose beaucoup sur les droits de douane qui assurent autour de
60 % des recettes fiscales. L’absence d’une taxe générale sur la consommation
a provoqué une dépendance vis-à-vis des droits de douane ce qui a conduit à une
hausse du niveau effectif de la taxe sur les recettes de plus de 20 % (sachant
que ce taux s‘élève à 14 % – taxe sur la consommation non comprise). Malgré la
baisse des tarifs douaniers fin 2000, qui a provoqué une baisse du niveau effectif
de la taxe à 16 % (13 % taxe sur la consommation non comprise), ce taux reste
élevé en moyenne, comparé à ceux dans les pays voisins et autres dans le monde.
Pour M. Siniora, le système de déclaration périodique et celui de déduction de
la TVA sont supposés permettre à l’administration fiscale de collecter les taxes
le plus vite et avec le coût le moins élevé. De plus, une transparence est imposée
par le service du contribuable interdisant toute tentative d’alléger la charge
fiscale, vu que le contribuable est incapable de récupérer la taxe payée sur les
biens achetés, que ce soit des marchandises, des produits intermédiaires ou des
équipements, sauf sur présentation de documents assurant la vente et le paiement
des droits dus. Cette taxe, ajoute-t-il, présente l’avantage que son contrôle
permet de gérer l’impôt sur le revenu en même temps. Donc, son application est
censée augmenter le rendement de l’ensemble du système fiscal. Pour le ministre
des Finances, comme la TVA est une taxe neutre, elle incite à motiver les unités
économiques à se lancer dans de grands projets d’investissement vu qu’elle ne
provoque pas une hausse du coût d’investissement équivalent au montant de la taxe.
Liliane MOKBEL
Moins d'un mois
avant le Jour J, le dossier de la