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"Le
tumulte"
ou l'histoire d'un livre qui porte si bien son nom à
cause d'une polémique autour d'un évident
plagiat qu'on ne voudrait plus jamais voir dans une rentrée
littéraire francophone entre Paris et Beyrouth
L'auteur
du "Tumulte" de la rentrée littéraire
franco-libanaise a enfin trouvé un bandeau
de promotion!
Selim Nassib a été
récompensé du "Prix France-Liban
2022" pour son livre qui a défrayé
la chronique lors de la rentrée littéraire
pour une regrettable affaire
de plagiat: un choix sans doute très politique
compte tenu de l'autre polémique avec l'Académie
Goncourt lors du dernier "Festival Beyrouth
Livres" >
Lire...
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Lettre
ouverte à Madame Georgia Makhlouf, responsable
du jury du prix littéraire France-Liban,
décerné par l'ADELF, l'association
des auteurs de langue française.
>
Lire...
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Mr Sélim Nassib est lauteur
de "Tumulte" aux Éditions de lOlivier
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Décembre
2022:
Pour
"le tumulte", l'auteur Selim Nassib et son éditeur
ont-ils enfin trouvé un bandeau acceptable pour la
promotion du livre...
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Un choix
autant polémique que politique?
Grâce au soutien de la Fondation Boghossian,
dont le siège est à la Villa Empain, à
Bruxelles, le lauréat 2022 recevra 4.000 euros.
La remise officielle des prix aura lieu le 17 janvier 2023
à lAmbassade du Liban à Paris.
Sélim Nassib succède ainsi à Fouad
el-Etr pour son livre "En mémoire dune
saison de pluie",
prix
France-Liban de LAdelf en 2021.
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Le
prix Adelf France-Liban
a été décerné au roman Le tumulte
de Sélim Nassib publié aux Éditions
de lOlivier, parmi onze ouvrages sélectionnés
par lAssociation des écrivains de langue française
et trois autres finalistes Beyrouth-sur-Seine (Stock,
2022) par Sabyl Ghoussoub, Le Retournement (Grasset, 2022)
de Manuel Carcassonne et Les Racines du Chaos (éditions
Tallandier, 2022) de Pierre-Jean Luizard.
L'Adelf se sera sans doute contentée de la soit-disante
reconnaissance tardive par l'auteur de la paternité
de la phrase de Georges Boustany "Beyrouth
te suivra jusquà ton dernier souffle, où
que tu sois" pour
oublier cette polémique et lui décerner cette
récompense qui pourra enfin faire office de bandeau
promotionnel. Il fut un temps ou ce type d'incident eut
été éliminatoire mais il semble que
les temps changent et que des critères autres que
littéraires soient désormais pris en compte.
Les membres du jury, présidé depuis 2016 par
Georgia Makhlouf, sont : Carmen Boustany, Albert Dichy,
Valérie Marin La Meslée, Abdallah Naaman et
Bahjat Rizk. Dès cette édition 2022, le lauréat
sera invité à rejoindre le jury et à
participer à ses choix pendant un an.
Notez qu'à la mi-décembre,
il pouvait encore être constaté dans plusieurs
FNAC, notamment à Paris et d'île de France
que "Tumulte" s'exhibait toujours avec le bandeau
polémique...
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Cinq auteurs dont Selim Nassib renoncent à leur participation
à Beyrouth Livres
19 Octobre 2022- A
la veille du lancement de ce "Salon du livre francophone
nouvelle formule", quatre membres de lAcadémie
Goncourt motivent leur désistement par
« la dégradation générale de
la situation au Liban ».
Lécrivain Sélim Nassib dénonce
les propos du ministre libanais de la Culture.
Lécrivain Philippe Claudel, secrétaire
général de lAcadémie Goncourt,
a quant à lui confirmé à LOrient-Le
Jour que quatre de ses membres, à savoir Éric-Emmanuel
Schmitt, Tahar ben Jelloun, Pascal Bruckner et Pierre Assouline,
ny participeront pas en raison de « la dégradation
générale de la situation au Liban ».*
Selon lAcadémie Goncourt, cette décision
nest pas liée aux récentes déclarations
du ministre libanais de la Culture. Le 8 octobre, Mohammad
Mortada (proche du parti Amal) a affirmé que son
ministère a « été informé
que des instituts amis organisent des événements
culturels (...) à loccasion desquels un certain
nombre décrivains visiteront le Liban et participeront
à des rencontres itinérantes dans plusieurs
régions du pays. Parmi ceux-là se trouvent
un certain nombre ayant embrassé les projets sionistes
dans la pensée et dans la pratique, les soutenant
aussi bien dans leurs travaux littéraires que dans
leur vie quotidienne ». « Nous ne permettrons
pas la normalisation culturelle masquée avec le sionisme
au Liban », a-t-il ajouté. Sadressant
à la « partie étrangère parrainant
cet événement », à savoir la
France, il a ensuite précisé ceci : «
Votre pays ne permettrait pas à des militants du
Liban de se rendre dans (votre) pays pour critiquer le droit
des pratiques sionistes, et en retour nous ne permettrons
pas à des sionistes (...) de diffuser le venin du
sionisme au Liban, même si, en apparence, ils semblent
détenir les passeports de votre pays.
*Au
final, quatre membres de l'Académie seront donc sur
place pour l'annonce des quatre livres de la sélection
finale annoncée le 25 Octobre à Beyrouth:
son président Didier Decoin, son secrétaire
Philippe Claudel, et deux jurées, Camille Laurens
et Paule Constant.
L'argumentation
de Selim Nassib
Lécrivain français
Sélim Nassib, né à Beyrouth
dans une famille juive en 1946, explique dans un
communiqué pourquoi il ne se rendra pas à
Beyrouth pour y présenter son dernier roman,
Le Tumulte (LOlivier).
« Youssef, le héros de mon roman, est
né à Beyrouth dans une famille juive.
Le ministre parle-t-il de moi ? De quelquun
dautre ? De plusieurs autres ? Quoi quil
en soit, cette allusion à des auteurs masqués
soutenant secrètement les projets sionistes
ma profondément dégoûtée
», écrit-il. Contacté par LOLJ,
lécrivain affirme ne pas croire que
les propos du ministre le « visent »,
mais il juge ces « allusions assez nauséabondes
», « prononcées dans un climat
dimpunité ». « Ce nest
pas la peur qui me fait renoncer à venir,
mais ma conviction, et je ne veux pas jeter une
ombre sur ce festival que les Libanais attendent
et dont ils ont tant besoin.
Cest ma décision personnelle et je
ne veux entraîner personne », appuie
Sélim Nassib.
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Compte tenu de ses "acquaintances
assez privilégiées" et de son profil
atypique, Selim Nassib, empêtré dans une polémique
de plagiat grossier concernant son dernier livre,"Le
tumulte" aura donc trouvé un échappatoire
rêvé pour s'extirper du piège beyrouthin
qu'il se sera lui-même tendu et pourra donc esquiver
le feu des critiques locales qui l'attendaient...
Ce n'est pas la peur qui me fait renoncer, clame t-il:
Voilà qui sonne comme un aveu alors même qu'il
s'est bien gardé de faire la moindre allusion à
sa retentissante affaire de plagiat liée à
son dernier livre!
Au final, son absence à - Beyrouth Livres 2022 -
était déjà..."écrite"
à l'avance.
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Le
plagiat, ou cette insoutenable auto-destruction de l'oeuvre
Deux ans environ expliquent cet incident
littéraire. Il oppose un journaliste et écrivain,
Mr Sélim Nassib auteur du livre "Le Tumulte"
aux éditions de l'Olivier à Mr Georges Boustany,
contributeur occasionnel d'une rubrique "La carte
du tendre" dans le quotidien francophone libanais
"L'Orient-Le Jour".
Mr Nassib vit à Paris depuis des décennies
alors que Mr Boustany est resté à Beyrouth
après des études à Sciences Po Paris.
Le livre de Mr Nassib est paru en cette rentrée
littéraire 2022 et l'article de Mr Boustany, dans
le journal pré-cité, le 10 Octobre 2020,
soit quelques jours à peine après l'explosion
meurtière du port de Beyrouth.
Jusque là, il n'y a rien à redire, bien
au contraire, d'autant que nous avons la chance de lire
des auteurs libanais qui s'expriment à merveille
dans la langue de Molière et honorent cette francophonie
libanaise qui nous est si chère.
Mais..., c'est avant qu'un maudit bandeau frappé
d'une phrase puissante ne vienne mettre le feu aux poudres:
"Beyrouth te suivra jusquà
ton dernier souffle, où que tu sois",
laquelle
phrase est extraite par l'auteur, de la conclusion de
son livre, comme si elle en était à elle
seule le message essentiel, ce qu'il reconnaitra d'ailleurs
lui-même plus tard... C'est là que nait le
litige entre les deux auteurs puisque ladite phrase est
clairement plagiée à partir de l'article
de Mr Georges Boustany: "Beyrouth
vous suivra jusquà votre dernier souffle,
où que vous soyez".
Pour comprendre cette affaire, il faut savoir que Mr Sélim
Nassib, né en 1946, a été journaliste
et correspondant du journal français "Libération",
notamment durant la guerre du Liban en 1982 et la séquence
de l'invasion israelienne jusque dans la capitale libanaise.
Lui-même libanais de confession juive d'une famille
originaire de Syrie, il a grandi à Beyrouth et
s'assimile volontiers à un juif errant. Sélim
Nassib vit plusieurs décennies à Paris et
semble ne se rendre à Beyrouth que très
occasionnellement.
L'éditeur de son livre "Les éditions
de l'Olivier" est une maison d'édition parisienne
reconnue et dirigée par Mr Olivier Cohen qui tente
de défendre son auteur auprès de Mr Boustany,
tout en s'indignant que ce dernier ne modère pas
l'indignation d'une partie de la communauté libanaise
francophone qui s'est emparée de cette affaire
de plagiat évident sur les réseaux sociaux.
On sait mieux au Liban qu'ailleurs que certains sont maitres
dans l'art de retourner les coupables en victimes et personne
n'est dupe de la manoeuvre.
A priori, Mr Boustany n'entend pas, compte tenu des circonstances
économiques actuelles, s'engager dans une procédure
de poursuites judiciaires longues et coûteuses.
Il demande avant tout des actes plus que de belles paroles
d'excuses et de reconnaissance de la faute. La reprise
de sa phrase n'est pas anodine puisqu'elle constitue la
conclusion du roman de Selim Nassib et qu'elle a été
choisie comme accroche sur le bandeau de promotion pour
les libraires et la communication sur les supports de
vente en ligne.
On sait bien que la culture de l'excuse est très
en vogue notamment dans le microcosme bobo parisien et
que pour certains, lorsque le mal est fait, il est suffisant
pour avoir bonne conscience et expier ses fautes. Malheureusement,
cela semble un préalable nécessaire mais
non suffisant car trop facile!
D'autre part, comment imaginer qu'un livre, fut-il de
bonne qualité, soit toujours nominé pour
un prix littéraire (Prix
André Malraux) une fois ce plagiat débusqué,
et comment concevoir que ce livre et son auteur recoivent
les honneurs d'une invitation au festival "Beyrouth
Livres" qui doit se tenir à travers le Liban,
à partir du 19 Octobre 2022?
Dans ce type de situation, c'est au tribunal du public
de rendre son jugement, tout simplement. Cette affaire
est fort mal venue en pleine rentrée littéraire
et vient ternir l'image d'une francophonie libanaise rayonnante
et toujours si féconde notamment dans le secteur
de la littérature. Il ne parait pas possible de
la passer sous silence tant elle parait emblématique
d'une tendance très lourde au plagiat dans les
cercles universitaires et littéraires.
Faut-il encore rappeler le contexte douloureux qui inspira
l'auteur de la phrase originelle, dans un Beyrouth touché
dans sa chair? Mr Nassib n'était-il pas bien placé,
compte tenu de son passé, pour évaluer la
portée de sa trangression morale vis à vis
des victimes directes et indirectes de cette tragédie
humaine?
Pas besoin d'encombrer les palais de justice avec cette
affaire ni de faire appel à un certain Mr Hochstein,
grand spécialiste des négociations concernant
les litiges entre le Liban et son voisin: lorsqu'une position
est indéfendable, la noblesse appelle à
la discrétion et à l'effacement.
En l'état actuel des choses, il ne semble pas souhaitable
que l'auteur du livre "Le Tumulte" se déplace
à Beyrouth pour venir faire la promotion de ce
livre. "Le juif errant", comme il dit, pourra
par bienséance et sens de l'honneur passer cette
fois son tour pour revenir à Beyrouth à
une autre occasion.
Nous lui souhaitons, avec l'aide de son éditeur,
de briller dans les salons parisiens et les halls de librairies
après s'être brulé tout seul, après
avoir saccagé 414 pages avec une seule phrase qui
ne lui appartenait pas, ce qu'il a funestement "oublié"
de mentionner.
La mémoire est la faculté d'oublier disait
un certain Spinoza:
souhaitons à Mr Nassib, tel un phénix, de
renaitre des cendres qu'il aura laissé en brûlant
sa propre création. Et si, il ne comprenait toujours
pas pourquoi cette affaire génère tant de
réactions denses et passionnées, nous lui
répèterons inlassablement que c'est sûrement
grâce à l'éternelle
" Beyrouth qui nous en a donné le souffle
" !
JM
Druart - LibanVision
|
L'article original
de Georges Boustany
dans l'Orient-Le Jour du 10 Octobre
2020 *
* Six jours après l'explosion du
port de Beyrouth
Comment te quitter
« Celui qui est
né est coincé ! » sexclame ma
grand-mère en libanais lorsque la mélancolie
est en crue. Il y a quelque chose de blessant dans ces
rimes sans appel que crachent nos aînés,
comme si lexistence de toute leur descendance ne
comptait plus. Mais il y a aussi une constatation que
lon na pas envie de faire lorsquon est
jeune : la vie est un chemin de croix dont on na
pas le courage de sortir.
« Celui qui est né
ici est coincé », pourrait-on ajouter. Comme
une allégorie de la vie, on naît à
Beyrouth par la force du destin, sans avoir rien demandé.
On y souffre à intervalles irréguliers,
comme une torture chinoise dont on ne voit pas la fin,
et cest précisément là que
réside tout le diabolisme du processus. On tente
dy organiser une vie décente ponctuée
divresses et de gueules de bois. De faire son chemin
à la force du poignet. Et un matin, épuisé
de lutter, on se réveille avec une furieuse envie
de quitter cette ville-piège. Mais il est trop
tard : Beyrouth vous suivra
jusquà votre dernier souffle, où que
vous soyez, et cest elle qui fermera vos paupières
une dernière fois.*
Il faut observer des milliers de
photographies à la recherche du secret de cette
ville pour espérer tomber sur des clés :
celle daujourdhui, en particulier, ouvre quelques
portes. En un seul déclic, le photographe a réalisé
lexploit de saisir un fragment de lâme
de Beyrouth. Voici une jeune femme au balcon, est-elle
sortie pour admirer le paysage ? Peut-être, mais
sa posture dit autre chose : elle est tournée vers
le photographe, elle est consciente de sa présence,
sans doute lui a-t-il demandé de regarder de côté,
et comme il a raison, elle est jolie et pensive et son
regard vague donne un cliché romantique à
outrance, le mythe de la belle qui attend son prince charmant.
Finalement, les photos de monsieur Tout-le-Monde ne sont
que des clichés dans tous les sens du terme.
Mais un grain de sable sest
introduit dans la mécanique : juste derrière
la belle, une fillette, sans doute la petite sur,
fait une grimace espiègle. Comme un cheveu sur
la soupe, cette mimique destinée au photographe
a tout gâché et le romantisme se transforme
en scène burlesque. En 1955, il ny a pas
de logiciel pour gommer cette frimousse coquine. En 2020,
on sen délecte. Comme on se délecte
des différentes strates de lecture quoffre
cette photographie : il y a lenvironnement, le voisinage,
et cette superposition de balcons et de toitures de tuile
qui donnent une poignante dimension à la scène
dont ils prennent la part du lion. Il y a, en plus de
ceux où se tiennent la belle et son photographe,
trois balcons spacieux comme nous en avons tant connu
dans notre enfance. Tout en bas, une famille est installée,
on aperçoit le père corpulent avec une canne,
la mère, deux filles, un massif de jasmin en fleurs,
cest lété. À létage
au-dessus, une femme assise et sa fille à la rambarde.
Au troisième étage dont larchitecture
plus tardive est dénuée délégance,
il ny a pas âme qui vive, juste des plantes
en pots. Alentour, cest une montagne russe de toitures
de tuile, ces pyramides brique qui ont longtemps fait
toute la beauté de notre capitale. Et puis une
fenêtre ouverte et une autre où lon
devine des rideaux. En toile de fond, la montagne entoure
Beyrouth comme pour la protéger ou la dévorer,
cest selon. La ville que lon aperçoit
dans cette image nexiste plus, sinon dans la mémoire
de ceux qui lont connue, et limage est si
intense quelle se transmettra à leurs enfants
qui en garderont une nostalgie inexplicable. Voici le
drame libanais : celui qui est né ici est coincé
ou fera tout pour y revenir.
En perdant ses balcons, Beyrouth a perdu son âme
Le ciel bleu omniprésent,
les températures clémentes toute lannée,
quelques petits jours de pluie pour laver la poussière
: il fait si bon vivre au balcon. Dans toute lexpression
de son visage, même si elle ne sen rend pas
encore compte, cette femme apprécie dêtre
là. Sourire discret aux lèvres dans lobjectif
de son amoureux, elle respire une jeunesse aux effluves
de jasmin. Elle regarde vers le port et plus loin la mer,
et sans le savoir, elle emmènera cette image-ci
dans tous ses exils, dans toutes ses douleurs, jusquà
son lit de mort. Cette vie de balcons, de terrasses, cétait
cela la vie des Beyrouthins. Doù nous sont
venus tous ces immeubles de béton et de verre,
ces appartements où lon a tout vitré,
quelle est donc cette (in)culture de lappartement
sans balcon, dans une ville où il fait si bon être
dehors ?
Comme si cela ne suffisait pas, toute notre époque
est une négation de Beyrouth. La misère
et lépidémie ont anéanti toute
vie sociale. Et lexplosion du 4 août a annihilé
ce qui restait de balcons sur la Méditerranée.
En les perdant, Beyrouth a perdu son âme. Il faudra
plusieurs générations pour effacer le souvenir
de ces quartiers animés, de ces familles vivant
dehors, conversant entre elles de balcon à balcon,
de cette lumière généreuse invitée
à pénétrer par des persiennes ouvertes
comme des bras accueillants.
Dans leur exil, ceux qui ont connu
ces espaces de plein air garderont limpression obsédante
que leur vie a perdu sa lumière, comme un regret
mêlé de nostalgie insomniaque. Comment ne
pas te quitter, Beyrouth ya Beyrouth, quand la vie dans
tes murs devient étouffante, insupportablement
difficile et incertaine, quand la déroute économique
menace de faire des ravages, quand le souffle du diable
a tout dévasté ? Comment te quitter, quand
ta lumière, ta convivialité, la douceur
de ton climat et la beauté de ta géographie
simpriment sur nos rétines comme des tatouages
indélébiles ? Celui qui est né ici
fera tout pour y retourner, même si ce quil
cherche nexiste plus.
Reproduction
du texte avec l'aimable autorisation de son auteur, Mr
Georges Boustany
*
On notera au passage que l'auteur
du Tumulte aura pris soin de remplacer le vouvoiement
par le tutoiement sur le bandeau et dans le texte du livre
mais encore de subtilement remplacer les paupières
par les yeux... Cette délicatesse sonnerait-elle
comme un aveu de plagiat mûrement réfléchi?
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Lettre
ouverte à Monsieur Sélim Nassif, auteur
du livre "Le Tumulte"
ICI BEYROUTH, 22 Septembre 2022
Cela
a commencé par une agréable surprise : tiens,
on me cite dans LOrient-Le
Jour* ! Et sous la plume de Joséphine Hobeika
(12
septembre 2022)
portant sur votre dernier ouvrage, qui plus est : ma fierté
était totale. Déjà, un titre darticle
prometteur : " Beyrouth te suivra jusquà
ton dernier souffle ", reprenant un morceau de phrase
tiré dun de mes articles écrits dans
la douleur de laprès 4-août**, "
Comment te quitter ? " Et, en conclusion de larticle
de Mme Hobeika, la quasi-intégralité de
la phrase en question : " Beyrouth te suivra jusquà
ton dernier souffle, où que tu sois, cest
elle qui te fermera les paupières une dernière
fois. " Malheureusement, la suite est une douche
froide : " (
) lavait pourtant prévenu
un de ses amis. "...
Cliquez sur l'image pour lire la
suite de la lettre
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Le tumulte: extraits
Bas de page 56 et page 57
...La rue redevient tranquille. Dans un renfoncement,
un portail dont les
deux battants sont ouverts. Vu lalignement des chaussures,
sûrement une
mosquée. Je jette un coup dil. Quelques
formes en blanc prient vers le
fond. Pas le moindre meuble, juste des nattes recouvrant
le sol et des piliers
qui se rejoignent en arcades à intervalles réguliers.
Un espace aussi calme
que la synagogue est agitée, aussi vide que la
rue est pleine, un contrepoids
parfait. Le minaret est juste au-dessus de ma tête,
on y a installé un haut-
parleur qui se met à grésiller atrocement.
Allaaaaaaahou Akbar, Allahou
Akbar ! La voix répète chacune des syllabes
en lui faisant décrire une
longue modulation. Cette musique, je la connais, je lai
entendue mille fois,
mais toujours comme un bruit venant dailleurs. Je
suis soudain au centre de
cet ailleurs. Ce qui se diffuse sur lensemble de
la ville est concentré ici.
Trop concentré. La puissance est mal réglée,
ça me vrille les oreilles.
Dautres appels se font entendre, les uns proches
et les autres lointains,
comme ça jusquà lhorizon. Allahou
Akbar ! Le Al, les lah, les Ak, les bar
saturent lair en un canon sans fin et me disent
interminablement où je suis.
Des hommes arrivent des deux côtés, des jeunes,
des vieux, ils
répondent à lappel de la prière
et convergent vers la porte de la mosquée,
cest-à-dire vers moi. Je choisis le groupe
le moins compact et me dirige
vers lui. Les corps seffacent pour me laisser le
passage, je remonte la foule
des fidèles à contre-courant. Ils me bousculent,
me contournent. Sils se
rendaient compte, ils se jetteraient sur moi. Mon courage
est épuisé pour
aujourdhui, il faut que je sorte dici.
Ya chab !
Cest un type qui mappelle. Il ny a personne,
lui et moi seulement. Un
gros en djellaba assis sur une chaise à la porte
dune boucherie, pieds nus
posés sur un tabouret. Il me fait signe dapprocher
en agitant un billet dune
livre. Son sourire découvre une dent en or, le
vent sengouffre sous sa
djellaba et la gonfle. Javance vers lui. Le billet
de banque, le sourire, la
djellaba, les quartiers de viande pendus derrière,
tous ces détails
sassemblent pour former une image précise.
LArabe par excellence,
moustachu et despotique, assis sur le trottoir, les couilles
au frais, le
dégoûtant Arabe qui attire les enfants, parle
fort, linjure à la bouche, mais
garde au fond de lui une douceur parce quil aime
les loukoums...
Page 414 (dernière page du
livre avant les remerciements)
Je voulais te dire. Le journal ma téléphoné
pour me demander de
prendre lavion et repartir à Beyrouth...
Jai refusé.
Ça ne métonne pas de toi.
Il ma dit ça comme on renvoie une balle de
ping-pong mais, après un
temps, il se reprend :
Au fond, tu as raison... Les Palestiniens ont perdu
parce quils ont été
obligés de repartir en exil, les Israéliens
parce que leur poulain sest fait
dégommer et quils subissent une défaite
morale terrible, les Libanais parce
que rien nest réglé et quils
vont continuer de sentretuer. Il ny a plus
aucune place pour nous ici. Les communautés juives
du monde arabe ont
toutes été déracinées à
cause dIsraël... Il ne restait que nous, derniers
des
Mohicans... derniers à partir.
Quest-ce que tu vas faire ?
Comme je tai dit. La guerre est perdue pour
moi, pour toi, pour tous.
Mais je resterai à Beyrouth. Comme individu. Je
nai plus la force daller
faire semblant ailleurs. Toi, apparemment, oui. Tu peux
rejoindre le monde
et faire de ton mieux pour y vivre. Tu te souviens
de ladage que tu mas
cité un jour : "
Beyrouth te suivra pas à pas jusquà
ton dernier souffle où
que tu sois..." Cest elle qui te fermera
les yeux une dernière fois » ? Cet
adage, il est pour moi. Toi, juif errant, va ton chemin
!
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Le point sur laffaire
Georges Boustany vs Sélim Nassib
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Beyrouth, 23 Septembre 2022
Le
dernier roman de Sélim Nassib, Le Tumulte (éditions
de lOlivier, août 2022), accompagne la trajectoire
dun personnage qui a grandi à Beyrouth. Des
années après avoir quitté le Liban,
il revient passer trois mois dans cette ville qui le hante,
en pleine occupation israélienne. Un de ses amis
lavait pourtant mis en garde, via cette phrase :
« Beyrouth te suivra jusquà ton dernier
souffle, où que tu sois, cest elle qui te
fermera les paupières une dernière fois.
»
Or,
le 10 octobre 2020, dans un article publié dans
LOrient-Le Jour, intitulé Comment te quitter,
Georges Boustany avait écrit : « Beyrouth
vous suivra jusquà votre dernier souffle,
où que vous soyez, et cest elle qui fermera
vos paupières une dernière fois. »
Notre
collègue, qui est également écrivain,
souhaite avant tout rappeler le contexte dans lequel il
a écrit cette phrase dans nos colonnes. «
Je faisais implicitement référence à
lexplosion daoût 2020, je voulais évoquer
symboliquement cette douleur et cet amour mortel pour
une ville que vous aimez et qui vous tue. Je nai
pas choisi le terme de souffle par hasard, et quand je
dis quelle vous suit partout, jai en tête
des amis qui se sont réfugiés dans leur
salle de bains et qui nont pas survécu au
drame », explique lauteur qui, aujourdhui,
déplore que son nom nait pas été
cité dans louvrage de Sélim Nassib.
« Lécrivain aurait pu mettre un astérisque
avec mon nom, en mentionnant cette phrase à deux
reprises dans son texte ; sil lavait fait,
jen aurais été honoré. Ce que
je souhaite, cest que ma paternité sur cette
phrase soit reconnue, dautant plus quelle
est utilisée comme argument de vente sur le bandeau,
sans mon accord », souligne Georges Boustany qui
est entré en contact avec lauteur et sa maison
déditions. « Nous en avons parlé
ensemble, et jai pu dire à Sélim Nassib
que javais apprécié son livre. Il
sest excusé et sest engagé à
préciser lors des prochains entretiens avec les
médias que cette phrase était de moi. Il
a ajouté que les prochaines impressions de lopus
comporteraient une mention de mon nom et a proposé
que cette formule ne soit plus utilisée sur le
bandeau de la couverture », poursuit Georges Boustany.
Mais il ajoute avoir été déçu
par la réponse de léditeur du Tumulte.
« Si ce dernier a bien confirmé les deux
premiers engagements, il a décliné le dernier,
le jugeant trop onéreux à mettre en uvre.
»M. Boustany a publié, sur sa page Facebook,
les correspondances autour de cette affaire, à
la fois avec M. Nassib et la maison déditions.
« Peut-être que pour une autre phrase je naurais
pas choisi de me battre, mais celle-ci sera reprise dans
mon prochain livre, qui est le second volet de mon recueil
darticles Avant doublier, dont la couverture
sera rouge, car dédiée aux victimes du 4
août 2020 », enchaîne le chroniqueur
qui se dit sensible aux marques de soutien quil
a reçues sur les réseaux sociaux. «
Je ne my attendais pas ; certaines librairies à
Beyrouth ont même pris linitiative denlever
le bandeau de la couverture du livre », déclare
Georges Boustany.
Aujourdhui,
Georges Boustany se réserve la possibilité
dentamer des poursuites judiciaires au Liban et
en France. Léditeur Olivier Cohen, fondateur
de la maison déditions lOlivier, rappelle
de son côté que lorsque le 12 septembre Georges
Boustany a protesté contre lutilisation dune
phrase dont il est lauteur, Sélim Nassib
a immédiatement appelé M. Boustany pour
sexcuser personnellement de ne pas lui avoir demandé
lautorisation de citer cette phrase. Il sest
également engagé à faire son possible
pour lui en reconnaître la paternité lorsque
loccasion se présenterait. « Le lendemain,
il (Sélim Nassib, NDLR) a pu constater que le contenu
de cette conversation avait été posté
sur Facebook par M. Boustany ainsi quune série
de requêtes adressées sur un ton comminatoire
à son éditeur », poursuit léditeur,
qui précise que « le 16 septembre, les éditions
de lOlivier ont répondu point par point dans
un e-mail très mesuré adressé à
M. Boustany ».
« Celui-ci sest à nouveau empressé
de divulguer cette correspondance privée sur Facebook,
en accompagnant sa publication de diverses insinuations,
menaces voilées et allégations variées.
Ce qui na pas manqué de provoquer un torrent
de commentaires agressifs de la part de ses amis
sur le même réseau social », note encore
Olivier Cohen, contacté par LOrient-Le Jour.
Et dajouter : « Depuis, ces attaques verbales
totalement disproportionnées sont devenues quasi
quotidiennes. Il appartient à M. Boustany de les
faire cesser en donnant lui-même lexemple
dune modération dont il na guère
fait preuve jusquà maintenant », conclut
le directeur des éditions lOlivier. Des accusations
que M. Boustany réfute, assurant défendre
sa cause « avec beaucoup de modération ».
Il déplore également que la photo de louvrage
de M. Nassib, sur le site de la maison déditions,
nait pas été republiée dans
le bandeau portant sa phrase.
Contacté
par notre rédaction, Sélim Nassib na,
pour sa part, pas souhaité faire de commentaires
sur le sujet. Ce que regrette M. Boustany, car il se serait
agi là, pour lui, dune première reconnaissance
publique de la paternité réelle de cette
phrase.
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