Phéniciens, Grecs, Romains, Byzantins et Arabes,
tous ont un moment convoité et investi la ville, imprégnant
ses remparts, édifices et murailles de mille et un sceaux. Véritable
kaléidoscope de cultures, la ville affiche progressivement ses
multiples appartenances, pour finir par déclarer ouvertement
son arabité et sa grâce orientale. Ville médiévale, ville portuaire,
ville des « douceurs », Tripoli s’est approprié au fil des ans
d’innombrables titres d’honneur, se targuant de ses mosquées,
souks, hammams et écoles coraniques, autant de richesses qu’elle
étale généreusement devant ses hôtes. La tournée en ville ne
saurait s’achever sans une escale dans le quartier d’el-Mina
qui borde la frontière de la ville historique : promenades sur
la Corniche, excursions en mer et trempette dans l’île des Palmiers,
un programme bien chargé qui vous retiendra dans la métropole
plus d’une journée.
Tripoli
illustre à merveille le contraste libanais:
Si certains quartiers ont de vrais airs d'Italie du sud
d'autres exhibent un modernisme très géométrique...
|
Festival de Tripoli
2004:
un programme varié, qui s’étend jusqu’au 11 septembre
Les
amateurs de ballet seront ravis de savoir que le 3e Festival de
Tripoli, édition 2004, a donné les premiers pas des festivités
de l’été, qui commencent aujourd’hui, jeudi, à la Foire Rachid
Karamé, au ballet ukrainien de Donetsk sous la férule de Vadim
Pisarev. Au menu, annoncé lors d’une conférence de presse, trois
soirées déployant le faste et le talent d’un art cultivé à son
degré suprême en Russie. Menant la ronde des spectacles, allant
du classique au moderne, Vadim Pisarev, professeur honoraire de
l’Université de Donetsk et détenteur, en 1995, du titre de «meilleur
danseur du monde» délivré par l’Unesco. Il faudrait noter aussi
que Pisarev est plusieurs fois médaille d’or (Kiev, Moscou, Jackson)
et qu’il a travaillé avec succès au Kirov du Théâtre Marinsky
de Saint-Pétersbourg ainsi qu’à l’Opéra du Rhin de Düsseldorf.
Danseur étoile, il fut acclamé pour ses rôles dans Giselle, Peer
Gynt, Le Corsaire, Spartacus, Roméo et Juliette, Le dernier tango
de l’ange… Pour lui donner la réplique, la prima ballerina Inna
Dorofeeva, lauréate de plusieurs prix, dont celui de Kiev et de
Jackson (USA) en 1990. À cela s’ajoute une prestigieuse troupe
composée de plus de soixante artistes. Pour les festivaliers de
la capitale du Nord, l’événement sera marqué en portant sur scène
le chef-d’œuvre de Michel Cervantès, Don Quichotte, dans une chorégraphie
de Marius Petipa et Alexandre Gorsky. Les costumes sont signés
J. Koriagina et le décor V. Spevjakin. Pour la seconde soirée
qui sera donnée au théâtre de l’Unesco à Beyrouth, le vendredi
27 août, l’ensemble offrira au public Peer Gynt d’Edward Grieg,
création qui reçut la «Rose d’or» et fut présentée pour la première
fois en 1996, en Norvège même, en mémoire du centième anniversaire
du compositeur. Plus moderne est le spectacle du samedi 28 août
, toujours au palais de l’Unesco à Beyrouth, présentant une suite
de tableaux tirés de Roméo et Juliette, Savanna (primé au concours
Serge Lifar), Le soldat (médaille d’or au concours Serge Lifar),
Les flammes de Paris, Adagio march (sur une musique de Mozart),
Black (prix Eurovision 2003) et l’Adagio d’Albinoni. Dans un registre
totalement différent, les amateurs de «tarab» et de chansonnettes
«chabablakié» (pour la jeunesse) pourront applaudir la star des
podiums arabes Amro Diab et sa troupe de musiciens le 2 septembre
(toujours à la Foire Rachid Karamé), ainsi qu’un récital de Georges
Wassouf et de sa troupe le 11 septembre.
Festival Musical à Tripoli du 6 au 14 Septembre 2003
Les spectacles du Festival de
Tripoli se dérouleront à la Foire internationale Rachid Karamé
En voici le programme:
– Samedi 6 septembre : spectacle de son
et lumière et feux d’artifice avec la participation du chanteur
Guy Manoukian et de la soprano Cynthia Samaha. Manoukian présentera
les chansons de son nouveau CD, al-Ourdon, un mélange de musique
moderne et classique.
– Jeudi 10 septembre, soirée avec les vedettes du programme
télévisé Superstars qui ont connu un vif succès jusque-là.
– Samedi 13 septembre : Ihab Toufic et Nancy Ajram interpréteront
leurs nouvelles chansons.
– Dimanche 14 sptembre : Kazem el-Saher animera la soirée.
Tous les spectacles commencent à 21 heures.
Les billets sont en vente au Virgin Megastore du centre-ville
01/999 666 et de Jnah 01/823287 ; au Quality Inn de Tripoli 06/211
255 et à La Cité de Jounieh 09/900 000.
|
Balade à travers l’histoire de Tripoli
Tripoli, vue générale
Le cœur médiéval
Première étape : la descente
à partir du château vers la ville médiévale, un lieu magique
qu’il faut absolument découvrir à pied. Après avoir traversé
un passage voûté, les souks spécialisés
se livrent l’un après l’autre à la manière d’un labyrinthe
aux sentiers inextricables. En suivant fidèlement leur
itinéraire, les anciennes galeries aux couleurs orientales
aboutissent sur des souks récemment rénovés comme celui
des bijoutiers. Également restauré, le khan des Khayyatine
(souk des couturiers) est ponctué de très belles arcades
transversales d’où filtre la lumière du jour. Des échoppes
de tailleurs, qui exhibent de magnifiques abayas artisanales,
rythment cette allée d’un bout à l’autre. Certains souks,
comme celui des Attarine (les parfumeurs) qui est relativement
mal entretenu, devraient bientôt être restaurés. Construits
par les Mamelouks sur le modèle cairote, ces souks au
style un peu baroque constituent le cœur commercial de
la ville où s’échangent toute sorte de marchandises. Pour
les amateurs du genre, le souk des Nahhassin (les artisans
du cuivre) offre de splendides articles en cuivre travaillé.
Ici et là, les vendeurs ambulants hèlent les passants,
les invitant à déguster la fameuse galette tripolitaine
au fromage. Imad el-Haddad, lui, a choisi de les tenter
par une douceur dont seule la famille, dit-il, connaît
la recette. Entamée en 1858, la confection de la « halawa
chmaysiyya » à la crème de lait s’est transmise chez les
Haddad de génération en génération.
|
Vers l’île
des Palmiers
Dernière étape de la visite
:
le quartier el-Mina ou le
versant maritime de la cité. Mais avant d’entamer cette
tournée, les Tripolitains vous conseilleront de faire
une escale « spécial douceurs » chez les innombrables
vendeurs de gâteaux arabes dispersés à travers la ville.
La dynastie des Hallab, des Tom ou des Almawiyyé, dont
la réputation n’est plus à faire, sert également un excellent
« knéfé » et de la halawit el-jibn (une pâte de fromage
sucrée) que l’on peut déguster à longueur de journée.
Autre petit détour conseillé : un arrêt de dix minutes
chez les fameux glaciers Ich Ich et Hadla situés à quelques
mètres du port. Les vendeurs offrent une exquise citronnelle
glacée faite à partir d’une veille technique de réfrigération
du jus de citron et d’orange. Sur le port, les pêcheurs
se précipiteront pour vous proposer un petit tour en mer
(7 000 LL l’aller-retour par personne) en direction des
quatre ou cinq îles situées à quelques km de la côte.
La plus importante est l’île des Palmiers qui recèle une
magnifique plage sablonneuse ponctuée de sources d’eau
douce. L’île est également connue sous le nom de Jaziret
el-Aranib, (l’île aux Lapins), des lapins y ayant été
introduits pendant le mandat français pour servir de gibier
aux administrateurs. Depuis, ces créatures n’ont plus
jamais quitté l’île. L’endroit abrite en outre diverses
espèces d’oiseaux rares et sert de refuge aux tortues
vertes qui viennent pondre leurs œufs sur ses rivages.
Des instants de rêve comme on en connaît plus au Liban.
|
Souk el-Khan, le souk des bijoutiers,
a été récemment restauré
Sur le Web...
* Tripoly
City Guide par Baron& Baron, le site des
voyages non traditionnels.
et
Tripoli-City.org
Un Portail Francophone
sur Tripoli - Trablous
|
Tripoli,
1ère ville libanaise à adopter un plan
d'action pour l'environnement et l'écologie...
>>>
Lire
|
La
grande Mosquée de Tripoli
Cette Page est encore en construction...
|
Tripoli, cité aux multiples personnalités
L’été n’est certes pas la saison rêvée
pour projeter une visite dans une grande cité d’Orient.
Pourtant, Tripoli, ville côtière au charme fou, promet
au visiteur plus qu’un simple tour en ville. Un véritable
bain de culture attend le voyageur dès son accès à la
capitale du Liban Nord. En dépit d’un souffle de modernité
qui a métamorphosé certains quartiers, la ville porte
dans ses entrailles les vestiges des anciennes civilisations.
Jadis destinée à devenir la capitale du Liban, une position
qui a fini par échoir à Beyrouth, Tripoli a fini par se
contenter de la seconde place, se prévalant toutefois
d’avoir su préserver jalousement son héritage historique.
Le prestige de la ville était tel qu’il y a quelque deux
mille quatre cents ans, le premier « parlement » du bassin
Est de la Méditerranée s’est réuni dans cette capitale,
raconte Nina Jidéjian dans son ouvrage intitulé Tripoli
Through the Ages. Le nom de la ville a été mentionné pour
la première fois au Ier siècle avant Jésus-Christ, dans
les textes anciens où l’on parlait de Tripolis ou la ville
des trois cités englobant la région du port – el-Mina
– et deux grands quartiers al-Kobbé et Abou Samra, séparés
par la rivière Abou Ali, comme le souligne Mme Jidéjian.
Pour d’autres auteurs, cette trilogie fait référence aux
trois communautés distinctes qui formaient la population
de la ville à l’époque hellénistique. Regorgeant de sites
archéologiques, la ville se déploie dans toute sa magnificence
du haut du château Saint-Gilles, une forteresse datant
de l’époque des croisés. Édifié en 1104 par Raymond de
Saint-Gilles, qui venait d’envahir la ville après avoir
infligé une lourde défaite aux armées arabes, l’imposant
château aux murailles imprenables raconte l’histoire mouvementée
de l’époque. Après avoir été détruite en 1289 par les
Mamelouks venus conquérir la région, la citadelle fut
reconstruite par ces derniers. Les Ottomans s’en emparèrent
à nouveau au XVIe siècle. Ils y effectureront des restaurations
diverses. Ainsi la citadelle porte à ce jour les traces
des trois civilisations. Durant les périodes mamelouk
et ottomane, Tripoli se développera autour de cette construction.
C’est à partir de cette colline – appelée mont Peligrinus
à cause des pèlerins qui y faisaient escale avant de se
rendre à Jérusalem – que Mira Minkara, une jeune guide
touristique de la ville, conseille aux visiteurs d’entamer
leur aventure tripolitaine.
|
Les senteurs
de l’amour
Autrement enchanteur, le khan es-Saboun, ou caravansérail
du savon, recèle un véritable musée d’arômes qui allèchent
le piéton dès son accès à la galerie. Situés aux contours
d’une grande cour flanquée d’un magnifique bassin, les
boutiques et ateliers de savon lâchent à tour de rôle
une foule de senteurs exotiques. C’est grâce à la famille
Hassoun que les techniques traditionnelles de l’industrie
du savon ont été réintroduites il y a quelques années.
« Le parfum apaise l’âme », assurent les Hassoun en offrant
à vos narines des savons bariolés et multiformes. Composé
d’un mélange de miel, d’huile d’olive et de parfums orientaux,
le savon tripolitain est en effet vanté pour ses bienfaits
médicinaux. Le souk, qui existe depuis huit cents ans
aux dires des fabricants, abritait des cliniques de médecine
populaire qui confectionnaient des savons à partir des
plantes. Cette pratique a récemment ressurgi en s’adaptant
aux maux du siècle : « Maladies de la peau, troubles psychologiques,
stress, problèmes sexuels, tout peut être guéri à partir
des senteurs », affirment les Hassoun.
|
Le port d'El Mina et l'île aux
palmiers,
zone des chercheurs d'Amphores au Liban
Le défilé des
époques
Si vous visitez Tripoli pour la première fois, mieux vaut
être accompagné d’un guide qui non seulement se fera un
plaisir de vous raconter l’histoire de la cité, mais vous
sortira habilement des dédales de ces souks. C’est sur
la grande mosquée que débouche l’un d’entre eux. Édifié
en lieu et place de la cathédrale Sainte-Marie de la Tour,
construite au XIIe siècle par les croisés, l’édifice religieux
trône au cœur de la cité médiévale. La mosquée fut reconstruite
par les Mamelouks sur les vestiges de la cathédrale après
que celle-ci fut dévastée par un tremblement de terre.
Les traces en sont toujours visibles, notamment sur le
portail d’entrée au style gothique. On pense d’ailleurs
que le grand minaret rectangulaire était vraisemblablement
le clocher de la cathédrale croisée. À l’entrée nord de
l’édifice, deux magnifiques portails révèlent l’existence
de deux madrassas ou écoles coraniques datant du XIVe
siècle : el-Mashhad et el-Shamsiyya. Elles sont relayées
de l’autre côté de la rue par deux autres écoles : el-Khayriya
Hassan et el-Nouriya qui datent de la même époque. Tripoli
est également réputée pour ses fameux hammams, dont un
seul – le hammam el-Abed construit à la fin du XVIIe siècle
– est encore ouvert au public. C’est toutefois le hammam
el-Jadid qui reste le mieux préservé à ce jour. Aménagé
vers 1740 par le gouverneur de Damas Assad Pacha el-Azem,
le « Nouveau Hammam » a été ainsi appelé car sa construction
était considérée comme relativement récente par rapport
aux hammams édifiés au XIVe siècle par les gouverneurs
mamelouks, explique Mme Jidéjian. Une autre variante consiste
à suivre un itinéraire différent toujours à partir des
souks, qui peuvent alors vous mener jusqu’à la plus ancienne
mosquée de la ville, Abdel el-Wahed, construite vers 1305-1306
et dont les arcades de style mauresque se marient avec
des rajouts plus modernes. Mais quel que soit votre emploi
de temps, une visite à la mosquée Taynal (XIVe siècle)
– « le lieu le plus magique deTripoli », selon Mira Minkara
– est à prévoir. « Le lieu baigne dans une magnifique
atmosphère orientale que vient perturber la présence de
quelques colonnes romaines », raconte le guide.
|
Une
bonne page-web sur Tripoli?
Quelques
adresses utiles
Pour manger...
– Kasr Chater Hassan : vaste
restaurant servant une cuisine libanaise. Il faut compter
15 $ par personne.
– El-Chate’ el-Fouddi (Silver
Shore) : corniche d’el-Mina : établissement haut de gamme
spécialisé dans le poisson et les fruits de mer (environ
30 $ par personne).
– Brunch : rue el-Mina. Cuisine
internationale. 10 $ par personne.
– Dannoun : restaurant populaire
qui sert d’excellents plats libanais. Connu surtout pour
sa succulente fatté (prix : 5 dollars par personne).
Pour dormir...
– Château des Oliviers :
(villa Nadia), Heykali, à 4 km de Tripoli. Au flanc d’une
colline dominant la ville, le château est une imposante
demeure convertie en hôtel. Bordé de jardins et doté d’une
piscine. Les chambres sont meublées de manière personnelle,
certaines avec vue panoramique. Chambre à partir de 90
dollars, petit déjeuner compris ( www.château-des-oliviers.com).
– Quality Inn : près de la
Foire internationale entre el-Mina et le centre-ville.
Chambres luxueuses avec climatisation.
– Chez Sultan : chambres
défraîchies avec climatisation, certaines avec balcons
et vue sur mer. Rapport qualité/prix acceptable pour une
chambre sur mer.
– Pension Haddad : un endroit
convivial, tenu par la famille Haddad. Chambres dortoirs
propres et confortables avec ventilateur (6 dollars le
lit, 12 dollars pour la chambre double); idéal
donc pour les petits budgets.
>>> sur
internet
Dossier réalisé
par Jeanine JALKH
Août 2003
|
email/courriel:
|
Dix-neuf millions de dollars pour la réhabilitation
de la vieille ville de Tripoli
Les travaux seront lancés en avril 2005 dans le cadre du projet
CHUD
Dans le
cadre du projet CHUD (Cultural Heritage and Urban Development)
et suite à un prêt de 62 millions de dollars, accordé il y a un
an par la Banque mondiale et les gouvernements français et italien
en vue de développer le potentiel archéologique et touristique
de cinq sites historiques du Liban, 19 millions de dollars sont
affectés à l’ancienne ville de Tripoli. Ils constituent une aubaine
pour sauver un patrimoine abritant des centaines de vestiges croisés,
mamelouks et ottomans, dont des souks vieux de 700 ans, considérés
comme les plus importants du Liban, car ils ont conservé leur
tissu urbain et sont habités jusqu’à aujourd’hui, alors que les
centres des autres villes ont été détruits ou encore envahis par
le béton. S’étendant sur six kilomètres carrés, la vieille ville
de Tripoli comprend des mosquées, des «madrassa» (écoles coraniques),
des «hammams» (bains publics), des fontaines et des khans (caravansérails).
Le prêt de 19 millions de dollars sera consacré à la réhabilitation
de ce patrimoine, en état de délabrement avancé. Sa mise en valeur
favorisera les conditions d’un développement économique durable
et permettra, par conséquent, d’améliorer la qualité de vie. Architecte
spécialiste dans la conservation des monuments et sites, responsable
de la partie urbaine du projet CHUD, M. Nabil Sami Itani indique
qu’un constat précis de chaque état des lieux a été établi. Des
études portant sur le tissu urbain, architectural, économique
et social ont été mises au point. Un budget relatif à chaque ville
a été retenu par les experts. De même, les procédures relatives
aux adjudications ont été rigoureusement établies par la Banque
mondiale. L’étude de réhabilitation et revitalisation de la ville
ancienne, entreprise par les architectes Habib Debs, Mosbah Rajeb
et Jad Tabet, a permis de «définir les points d’action du projet,
les limites de l’ancienne ville et son périmètre de protection
ainsi que les priorités dans les interventions», a signalé Nabil
S. Itani, ajoutant que le dossier comprend plusieurs volets :
la restauration des souks, la consolidation des monuments, l’aménagement
des quartiers riverains du fleuve Abou Ali et la construction
d’habitations pour 66 familles déplacées qui squattent le bâtiment
historique de Khan al-Askar. Prévu également au programme, les
travaux d’infrastructure dans la vieille ville, l’organisation
du trafic routier et piétonnier dans son périmètre, la création
de parkings et la réhabilitation des espaces publics. «La stratégie
d’intervention a été établie suite à une analyse du patrimoine
bâti dans la ville ancienne mais aussi et surtout suite à une
enquête socio-économique menée auprès des familles, dans chaque
immeuble et chaque commerce», explique l’architecte urbaniste
Habib Debs. «On a remarqué que l’espace commercial des souks était
très dynamique, que certains métiers – comme la menuiserie – se
portaient bien et que d’autres – la pâtisserie arabe, par exemple
– se développaient fortement. L’activité du souk constitue une
attraction en soi, et son attractivité touristique potentielle
peut représenter une source de revenus substantielle pour la population
locale caractérisée par une forte densité d’occupation de l’espace
et la faiblesse de ses revenus. Notre objectif était donc de préserver
le tissu urbain et de revitaliser le tissu économique tout en
visant à maintenir les habitants, les artisans et les commerçants
sur place. Nous nous sommes placés résolument dans une stratégie
différente de celle de Solidere et l’idée d’une ville-musée n’a
non plus effleuré personne», dit Habib Debs. Il ajoute que les
monuments historiques «représentent un important potentiel touristique
à exploiter. Leur restauration et l’implantation de programmes
d’activités culturelles, sociales, d’exposition de produits (vocation
historique des khans), de formation des artisans, devraient stimuler
la croissance économique et améliorer le niveau de vie». L’architecte
a, par ailleurs, souligné que «la réhabilitation de la vieille
ville permettra à la clientèle tripolitaine de renouer les liens
avec ces quartiers longtemps abandonnés à cause de leur vétusté
et de leur pauvreté. L’aménagement paysager des espaces publics
et des artères urbaines a pour objectif de relier la vieille ville
à la ville moderne. La mise en œuvre du projet permettra de réduire
la fracture sociale et urbaine entre ces quartiers». Debs a aussi
signalé que cet espace urbain sera principalement une zone piétonne
et que la voie expresse qui longe le fleuve Abou Ali sera déviée
et les berges aménagées en un espace paysager.
Hammam El Jadid construit en 1740
Une belle aventure se profile à l’horizon
Les travaux qui devraient débuter en avril prochain «n’ont pas
pour objectif de dessiner une nouvelle ville. C’est une intervention
soft que nous entreprenons», a expliqué Maged Fattal, coordinateur
du projet CHUD. Il ajoute que l’opération, placée sous la houlette
du CDR (Conseil du développement et de la reconstruction), cible
les souks et les lieux de mémoire, et vise principalement à promouvoir
les activités culturelles, les métiers traditionnels et les services
relatifs au patrimoine et au tourisme. Fattal et Itani ont mis
l’accent sur la consolidation de plusieurs monuments dont Khan
al-Arsat (ou khan el-Kameh) et Khan el-Aaskar (caravansérail des
militaires, datant du début du XIVe siècle) mais aussi sur les
travaux d’infrastructure et de restauration qui seront entrepris
dans les quartiers englobant les souks al-Nahassin, al-Najjarin,
al-Bazerkan où une partie des travaux est financée par la Fondation
Farès (250000 dollars), el-Hraj en cours de réfection grâce à
des fonds allemands (400000 euros) et al-Khayattin sur lequel
les Espagnols sont intervenus. Considérées par ailleurs «du domaine
public», les façades urbaines de la vieille ville seront traitées
dans le cadre de la mission CHUD, par Yasmine Maakaroun. Celles
d’al-Bazerkan, par exemple, couvrent une distance de plus de 2200
m et une surface de quelque 12000 m2. Opération coup de jeune
également pour les quatre hammams dont al-Nouri et Ezzeddine.
Propriété de la DGA (Direction générale des antiquités), Hammam
Ezzedine, le plus grand et le plus ancien, s’est vu attribué par
la Caisse arabe du développement économique et social un don de
330000 dollars. La réhabilitation de Tripoli comprend aussi la
mise en valeur de la citadelle croisée qui surplombe la ville
de Tripoli: éclairage de la pierre, installation de panneaux signalétiques,
création d’un musée et aménagement d’un jardin autour du site.
Les urbanistes se sont penchés également sur l’aménagement des
quartiers riverains du fleuve Abou Ali dont l’état des lieux actuel
représente une «véritable plaie dans la ville», relève Nabil S.
Itani. Il explique que des deux côtés des rives, les voies de
communication étranglent la vieille ville et l’étouffent. Aussi,
pour désengorger la zone, une réorganisation globale du trafic
routier est prévue dans le projet, qui lorgne aussi vers la création
de parkings et l’aménagement des différents accès qui mènent aux
souks. D’autre part, un chapitre est réservé à la gestion et à
l’embellissement des places publiques, à la création des espaces
verts et à l’installation du mobilier urbain, autour des principaux
monuments, telle la mosquée Bortassi, Khan el-Askar, Souk el-Nahassin,
à l’intersection du fleuve Abou Ali et Bab el-Tebbaneh. Selon
le coordinateur du projet CHUD, la réhabilitation et la revitalisation
de la ville ancienne de Tripoli devraient faire «boule de neige
et encourager les gens à prendre des initiatives privées et entreprendre
en parallèle des travaux de restauration… Notre mission est centrée
sur une approche stratégique pour protéger, conserver et mettre
en valeur le patrimoine culturel du pays qui agira comme moteur
pour le développement du tourisme», ajoute Maged Fattal.
Des contraintes?
Mais pour en arriver là, il y a des difficultés à surmonter. La
grande densité urbaine (habitations ou commerces), l’exiguïté
des ruelles (à peine deux mètres de largeur parfois), l’insalubrité
et l’inaccessibilité de certains bâtiments présentent des contraintes
sur le terrain. «Aussi, pour ne pas arrêter la circulation et
geler les activités commerciales, les travaux de réfection seront
entrepris par tranches, permettant ainsi de minimiser l’impact
des opérations sur l’activité économique», expliquent Maged Fattal
et Nabil S. Itani. Ils insistent également sur l’importance de
la coordination entre les différents intervenants, notamment les
ministères des Travaux publics et de l’Énergie, chargés de l’exécution
de plusieurs projets d’infrastructure. Mais ce n’est pas tout.
«Les habitants doivent, eux aussi, contribuer à la réussite du
projet.» Dans ce sens, un partenariat a été mis en place avec
la municipalité et les ONG qui mènent auprès de la population
des campagnes de sensibilisation à la valeur de leur héritage
historique, attirant leur attention sur l’importance du tourisme
culturel comme source de revenus. En effet, pour marquer ses objectifs
à long terme, créer du travail, éradiquer la pauvreté et la stagnation
économique, le plan met l’accent sur la synergie culture/économie.
May MAKAREM pour L'Orient-LeJour
Bureaux d’étude Rappelons que pour le projet CHUD, ARS Progetti,
spécialisé dans l’aménagement des sites archéologiques, et ECC
ont été chargés d’élaborer le projet d’étude concernant Baalbeck.
Jacques Liger-Belair a signé celui de Byblos. Saïd Bitar s’est
penché sur Saïda. Pierre el-Khoury, sur Tyr. Et comme signalé
dans l’article, Habib Debs, Mosbah Rajeb et Jad Tabet ont établi
l’étude de réhabilitation et de revitalisation de la vieille ville
de Tripoli.
|
|