De SABRA et CHATILA 1982

à JENINE 2002


Septembre 2004

Il y a 22 ans, Sabra et Chatila, crimes de guerres, symboles de la Résistance.

Juillet 2003
La loi de compétence universelle sera bien réduite à une peau de chagrin

A peine nommé, le nouveau Premier Ministre Belge qui se succède a lui même, a pris sa première décision: la loi de compétence universelle verra son terrain d'application notablement réduit pour permettre à Sharon de pouvoir dormir tranquille... Mais a t-il d'ailleurs été inquiet une seule seconde, celui qui sait combien les pressions et chantages sur le monde suffisent pour échapper à la justice des hommes lorsque ceux-ci se hasardent à la rendre plus sévère et moins sélective.

Peut-on en vouloir à la Belgique et à son Premier Ministre? sans doute pas, tant ses démarches et prises de positions depuis une dizaine d'années furent assez courageuses et justes; mais comment résister à tant de pressions lorsqu'on est un petit pays qui ose inquiéter ceux qui s'auto-proclament dépositaires de la morale et du Bien dans le monde.
Voilà que la famille Bush et le Général Tomy Franks risquaient eux-aussi d'entrer dans le champ des plaintes déposées au nom de cette Loi de compétence universelle.
C'en était trop, il fallait donc vite assigner la Belgique à davantage de réalisme et convaincre les derniers sceptiques que le monde ne connait qu'une seule loi, celle rédigée et appliquée par les alliés américano-sionistes.

Quant aux descendants des victimes et à ceux qui se battent pour la justice des justes, il ne leur restera que les larmes et le dépit pour noyer leur chagrin mais surtout la foi pour retrouver les forces afin de venir à bout de ce potentat sur le monde qui ne sera pas éternel!

JM Druart LibanVision


Sabra et Chatila
Le Premier ministre israélien sera justiciable dès qu’il perdra l’immunité liée à ses fonctions La justice belge rouvre la voie aux poursuites contre Sharon

12 Février 2003 - La Cour de cassation Belge valide la procédure de poursuites pour crimes de guerre contre Ariel Sharon.La plainte déposée avait été déclarée irrecevable par la Cour d'Appel en Juin 2002.Les poursuites pourraient donc reprendre rapidement. Rappelons toutefois que Sharon serait encore momentanément couvert par l'immunité que lui procure l'exercice de sa fonction de Premier Ministre récemment reconduite.
Si l'espoir reprend du côté des plaignants défendus par Maitre Chebli Mallat, la tension redevient vive entre l'Etat Belge et Israel qui décide le rappel momentané de son ambassadeur de Bruxelles.

Plus de détails?

La plus haute instance judiciaire belge a créé la surprise hier en rouvrant la voie à des poursuites en Belgique pour crimes contre l’humanité contre Ariel Sharon lorsque le Premier ministre israélien ne sera plus protégé par l’immunité liée à ses fonctions. Cette décision a suscité la colère d’Israël qui a immédiatement rappelé son ambassadeur en Belgique, Yehoudi Kenar, « pour consultations », laissant présager une crise grave entre Bruxelles et l’État hébreu. L’ambassadeur de Belgique en Israël, Wilfred Geens, a été également convoqué au ministère des Affaires étrangères à Jérusalem où il devait rencontrer aujourd’hui le chef de la diplomatie Benjamin Netanyahu. La Cour de cassation belge a annulé une décision de justice qui avait déclaré irrecevable l’an passé une plainte pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide contre M. Sharon pour son rôle présumé dans les massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila en 1982 au Liban. À l’époque des faits, M. Sharon était ministre de la Défense. La plainte le visant en Belgique avait été engagée par 23 rescapés des tueries, en vertu de la loi dite « de compétence universelle » adoptée en 1993 en Belgique pour permettre la poursuite d’auteurs de crimes de ce type, quels que soit leur nationalité ou le lieu où les faits ont été commis. « La coutume internationale s’oppose à ce que les chefs de gouvernement puissent faire l’objet de poursuites devant un État étranger », a rappelé mercredi la Cour de cassation, en reconnaissant à l’actuel Premier ministre israélien une immunité de fonction. Mais elle a, dans le même temps, annulé un jugement de la cour d’appel de Bruxelles qui avait déclaré en juin 2002 que la loi de compétence universelle ne pouvait s’appliquer que si l’inculpé se trouvait en Belgique. En clair, la décision de l’instance suprême de la justice belge signifie que les poursuites contre Ariel Sharon pourront être relancées le jour où celui-ci quittera la tête du gouvernement israélien. « Nous ne sommes pas satisfaits de cette décision et je suis troublé pour le bon déroulement des relations entre la Belgique et Israël », a aussitôt déclaré à Bruxelles Danny Shek, directeur des affaires européennes au ministère des affaires étrangères de l’État hébreu. « Pour nous, toute poursuite de citoyen israélien, qu’il soit Premier ministre ou non, est problématique », a-t-il ajouté. Si l’arrêt rendu mercredi protège temporairement M. Sharon, il ouvre en revanche la voie à une relance sans délai des poursuites contre le général Amos Yaron, responsable du secteur de Beyrouth en 1982 et visé à ce titre par la même plainte que le Premier ministre israélien. Le dossier a été renvoyé devant la cour d’appel de Bruxelles qui devra à nouveau se prononcer sur sa recevabilité à partir de la nouvelle jurisprudence de la Cour de cassation. Les avocats des rescapés de Sabra et Chatila se sont félicités de cette décision. « C’est un des arrêts les plus importants qui soit en droit international. La justice reconnaît que la loi belge sur la compétence universelle est indépendante du fait que l’accusé n’est pas en Belgique », a commenté l’un d’eux, Me Chibli Mallat. Outre Ariel Sharon, une trentaine d’autres dirigeants ou ancien dirigeants étrangers font l’objet de poursuites en Belgique au nom de la loi dite « de compétence universelle ». Parmi ceux-ci, figurent notamment le président de l’Autorité palestinienne Yasser Arafat, le leader cubain Fidel Castro ou l’ancien président tchadien Hissène Habré.

La loi de « compétence universelle »
La loi dite de « compétence universelle », en vertu de laquelle le Premier ministre israélien Ariel Sharon a été poursuivi en Belgique, est une loi unique au monde, qui date de 1993. Elle permet à la justice belge de poursuivre les responsables de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de génocide quel que soit l’endroit où ont eu lieu ces crimes et quelle que soit la nationalité des auteurs ou des victimes. Les poursuites sont déclenchées soit directement par le procureur, soit sur plainte des victimes auprès d’un juge d’instruction. Cette loi a déjà permis à la Cour d’assises de Bruxelles de juger, en juin 2001, quatre Rwandais pour leur participation au génocide de 1994 dans leur pays. Depuis ce jugement, les plaintes se sont multipliées. Elles visent à présent une trentaine de dirigeants ou d’ex-dirigeants étrangers, comme Ariel Sharon, Saddam Hussein, Fidel Castro, Yasser Arafat ou Hissène Habré. Mais l’application de cette loi innovante s’est heurtée à une série d’obstacles. En février 2002, la cour internationale de justice de la Haye a rappelé à la Belgique que le principe d’immunité devait s’appliquer aux dirigeants en fonction, conformément au droit international coutumier. Au printemps 2002, la cour d’appel de Bruxelles avait décidé que la loi ne pouvait pas s’appliquer dans le cas d’Ariel Sharon, au motif qu’elle ne pourrait s’appliquer que lorsque « l’inculpé est trouvé en Belgique ». C’est cette décision qui a été cassée vendredi par la Cour de cassation belge. Ces difficultés d’application ont poussé le Parlement à mettre en chantier un nouveau texte qui complète et précise la loi de 1993. Dans sa future version, encore en discussion, la nouvelle loi de compétence universelle reconnaîtra explicitement le principe d’immunité des dirigeants en fonction et restreindra les possibilités pour les victimes de déclencher directement les poursuites en déposant plainte avec constitution de partie civile. Pour les crimes commis après le 1er juillet 2002, les victimes ne pourront déposer plainte que si l’affaire a un lien avec la Belgique (auteur présumé belge ou se trouvant en Belgique, victime belge ou résidant en Belgique depuis plus d’un an). Si ces conditions ne sont pas remplies, seul le procureur aura la possibilité de déclencher les poursuites.

4 Novembre 2002

L’organisation de défense des droits de l’homme critique l’Onu et demande une nouvelle enquête internationale Amnesty accuse Israël de « crimes de guerre » à Jénine et Naplouse

On se souviendra que suite au massacre de Qana au Sud-Liban en Avril 1996 ou un rapport de l'ONU avait ensuite accablé Israel, Boutros Boutros Ghali avait été sacrifié, voyant son mandat de Secrétaire Général de Nations-Unies non renouvelé.On comprend dès lors mieux la plus grande prudence de son successeur devant la toute puissance du peuple autoproclamé élu...
Si Sharon a pu esquiver les crimes contre l'Humanité, Israel pourra t-il échapper aux crimes de guerre?
JMD

>>> L'Orient-le Jour du 04/11/2002 L’organisation de défense des droits de l’homme Amnesty International a accusé l’armée israélienne d’avoir commis des crimes de guerre lors d’opérations menées au printemps à Naplouse et à Jénine dans le nord de la Cisjordanie. Dans un rapport intitulé « Un rempart contre une enquête : les violations de l’armée israélienne à Jénine et Naplouse », Amnesty International appelle Israël et la communauté internationale à enquêter pour identifier les responsables de ces « crimes de guerre », quelle que soit leur fonction. L’organisation affirme qu’entre avril et juin, lors de son opération « Rempart », l’armée israélienne a tué des civils, torturé des prisonniers, utilisé des civils comme boucliers humains, détruit des maisons et empêché l’acheminement d’aides humanitaires et médicales aux Palestiniens. « Amnesty International croit que certains actes de l’armée israélienne décrits dans le rapport relèvent de graves violations de la Quatrième Convention de Genève et constituent des crimes de guerre », indique le document. Amnesty demande « une enquête complète, transparente et impartiale concernant ces allégations de violation des droits de l’homme et humanitaires ». Pour le directeur de la stratégie régionale d’Amnesty International, Javier Zuniga, Israël doit assumer la responsabilité de ces actes et coopérer en ouvrant une enquête sur le comportement de l’armée pendant l’offensive baptisée « Rempart », lancée le 29 mars en représailles à une vague d’attentats-suicide anti-israéliens. « La culpabilité est partagée entre le soldat qui a tué quelqu’un sans raison, ceux qui dans les structures de commandement lui ont donné l’ordre d’agir, ont toléré ou dissimulé de tels actes, et jusqu’au plus hautes autorités de l’État, car ils sont politiquement responsables, y compris le Premier ministre » Ariel Sharon, dit-il. M. Zuniga souligne que son organisation « n’est pas un tribunal ». « La première chose qui aurait dû se passer est l’ouverture (par la justice israélienne) d’une enquête judiciaire et cela n’a pas été encore fait », déplore-t-il. La publication de ce rapport intervient alors que M. Sharon vient de nommer au poste de ministre de la Défense le général Shaoul Mofaz, qui a dirigé en tant que chef d’état-major les opérations incriminées. Selon Amnesty, le bilan des morts à Jénine comprend « sept femmes, quatre enfants et six hommes âgés de plus de 55 ans alors que six autres personnes sont mortes sous leurs maisons qui se sont effondrées ». Amnesty a également critiqué le rapport rédigé par les Nations unies sur Jénine soulignant que les auteurs n’ont « visité ni Jénine ni aucune autre ville palestinienne ». « Israël n’a répondu à aucune des demandes faites par le sous-secrétaire général de l’Onu chargé des Affaires politiques », écrit l’organisation. Lors de l’opération « Rempart », qui s’est soldée par la réoccupation de la majeure partie des zones autonomes palestiniennes de Cisjordanie, l’armée israélienne avait lancé une offensive de grande envergure dans le camp de réfugiés de Jénine (« nid de terroristes » pour les Israéliens), au cours de laquelle 52 Palestiniens, des civils pour plus de la moitié, et 23 soldats israéliens avaient été tués durant dix jours d’intenses combats (3 au 12 avril), selon le rapport de l’Onu publié le 1er août. Ce rapport n’avait pas retenu les accusations de « massacre » avancées par des responsables palestiniens, mais avait accusé Israël d’avoir retardé l’aide aux blessés et l’arrivée des secours. Concernant Naplouse, Amnesty International indique qu’au moins 80 personnes ont été tuées au mois d’avril, dont sept femmes et neuf enfants de moins de 15 ans. « À Naplouse, l’armée israélienne a maltraité et parfois torturé les détenus âgés de 15 à 45 ans arrêtés lors de rafles », poursuit Amnesty International. Le rapport souligne le cas d’un jeune Palestinien infirme, âgé de 25 ans, battu alors qu’il était immobilisé sur une chaise roulante avant d’être emprisonné et poussé en bas des escaliers.

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16 et 17 Septembre 2002:
Le telescopage du calendrier!
Commémoration du 20ème Anniversaire du Massacre et
des Fêtes du Grand Pardon...

Sabra-Chatila : la flamme du souvenir


« Pour ne pas oublier… ». De jeunes sympathisants de la cause palestinienne
ont allumé des bougies afin que ne s’éteigne pas le souvenir. (Photo AFP)

Vingt ans plus tard, le souvenir des massacres de Sabra et Chatila reste toujours aussi vivant dans la mémoire du peuple palestinien. Hier, près de 2000 personnes, parmi lesquelles plus de 200 militants internationaux, ont pris part à la marche de solidarité organisée par les partis libanais et les organisations palestiniennes. Placée sous le signe de la mémoire, la manifestation, la plus importante depuis le massacre, a regroupé des activistes en provenance de l’Europe, du Japon et de la Turquie. Des députés européens sont venus rejoindre le cortège des manifestants qui réclamaient la condamnation d’Ariel Sharon, désigné comme premier responsable de cette tragédie. Pour la plupart des Palestiniens, cette commémoration est une occasion pour rappeler que les massacres continuent de se perpétuer sous l’égide du Premier ministre israélien, à Jénine, à Naplouse et à Gaza.

L'Orient-le Jour du 17.09.02

26 Juin 2002
Sabra et Chatila

Comme on pouvait s'y attendre, la justice Belge a décidé l'abandon des poursuites:

La plainte irrecevable car le Premier ministre israélien « n’a pas été trouvé en Belgique » La justice belge donne un coup d’arrêt aux poursuites engagées contre Sharon

La justice belge a stoppé hier les poursuites engagées il y a un an en Belgique contre le Premier ministre israélien Ariel Sharon en déclarant irrecevable la plainte déposée contre lui par 23 victimes des massacres de Sabra et Chatila, en 1982 au Liban. La chambre des mises en accusation de la Cour d’appel de Bruxelles a pris sa décision, qui était attendue, au motif que M. Sharon « n’a pas été trouvé en Belgique », restreignant du même coup la portée de la loi belge dite de « compétence universelle ». Cette loi datant de 1993 permet en théorie aux tribunaux belges de juger les auteurs de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide, quels que soient le lieu de ces crimes, les nationalités et les lieux de résidence des victimes et des accusés. La cour a également déclaré irrecevable une autre plainte pour crime contre l’humanité, déposée en Belgique en vertu de la même loi, contre le président de la Côte d’Ivoire Laurent Gbagbo et son prédécesseur Robert Gueï. En juin 2001, 23 Palestiniens rescapés de la tuerie de Sabra et Chatila avaient porté plainte sur la base de ce texte contre M. Sharon, qui était, à l’époque des faits, ministre israélien de la Défense. Quelque 800 à 2 000 personnes, selon les sources, avaient été tuées en septembre 1982 par les milices chrétiennes libanaises dans les camps de Sabra et Chatila, près de Beyrouth, pendant l’offensive israélienne au Liban. La justice belge avait suspendu la procédure en septembre, le juge d’instruction chargé de l’affaire s’interrogeant sur sa compétence à poursuivre un Premier ministre en exercice dans une affaire n’ayant en outre aucun « rattachement » territorial avec la Belgique. Après neuf mois de réflexion et plusieurs audiences des parties impliquées, la chambre des mises en accusation de la Cour d’appel de Bruxelles a rendu hier sa décision : elle a jugé la plainte irrecevable, sans se prononcer sur la question de l’immunité mais en arguant de l’article 12 du code belge d’instruction criminelle. « Pour que les poursuites basées sur la compétence universelle puissent être intentées valablement relativement à des crimes qui n’ont pas été commis en Belgique, il est nécessaire que les auteurs présumés soient trouvés sur le territoire du royaume », a expliqué la cour. Se prévalant du même principe, elle a jugé impossibles les poursuites contre Amos Yaron, le général israélien responsable du secteur Beyrouth en 1982 et actuel directeur du ministère israélien de la Défense, également visé dans la plainte. La décision en faveur de M. Sharon a été aussitôt saluée par les autorités israéliennes, alors que les victimes et plusieurs associations de défense des droits de l’homme faisaient part au contraire de leur vive déception. « Cette affaire était au début plus politique que légale, et c’est heureux qu’à la fin cela devienne plus légal que politique », s’est félicité Daniel Shek, directeur des affaires européennes du ministère israélien des Affaires étrangères, venu pour l’occasion à Bruxelles. Pour Shaul Amor, ambassadeur de l’État hébreu, cette décision va permettre de « dissiper le gros nuage qui planait sur les relations entre la Belgique et Israël ». À l’inverse, une Palestinienne qui s’était associée à la plainte a assuré qu’elle aurait « préféré mourir » plutôt que d’entendre la décision de la cour. « Ma déception est totale. Je croyais qu’ils allaient continuer jusqu’à ce que justice soit faite, et maintenant... », a déclaré Souad Srour el-Marai, les larmes aux yeux. Mme Srour affirme que ses six frères et son père ont été tués en 1982 lors du massacre de Sabra et Chatila, et qu’elle-même a été violée et blessée. Handicapée à vie, elle marche désormais avec des cannes. Pour l’association de défense des droits de l’homme Human Rights Watch, la décision est une déception « pour toutes les victimes des crimes contre l’humanité qui ont placé leurs espoirs dans la justice belge ». Les avocats des plaignants ont annoncé leur intention de se pourvoir en cassation.

 

16 Mai 2002

Plainte contre Sharon à Bruxelles: Il sera fixé sur son sort le 26 Juin
La justice belge pourrait reconnaître au Premier ministre israélien une immunité

Le Premier ministre israélien Ariel Sharon saura le 26 juin s’il sera poursuivi par la justice belge pour son rôle dans les massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila en 1982 au Liban. La chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Bruxelles a fixé cette date hier pour se prononcer sur la recevabilité de la plainte déposée en juin 2001 contre le chef du gouvernement de l’État hébreu par 23 Palestiniens rescapés de la tuerie, a-t-on indiqué de sources judiciaires.
Lors d’une ultime audience à huis clos, le représentant du parquet, l’avocat général Pierre Morlet, a pour la première fois suggéré mercredi à la Cour de reconnaître à M. Sharon une immunité due à sa fonction de Premier ministre en exercice et d’annuler les poursuites contre lui. Jusqu’alors opposé à un tel abandon, M. Morlet a expliqué à des journalistes son revirement par la nécessité de prendre en compte l’annulation en février par la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye d’un mandat d’arrêt international lancé par la Belgique contre l’ancien ministre congolais des Affaires étrangères, Abdulaye Yerodia. M. Yerodia était l’objet en Belgique d’une plainte basée sur la même loi que celle qui vise M. Sharon.
Cette loi, dite de « compétence universelle », permet aux tribunaux belges de juger les auteurs de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide, quel que soit le lieu de ces crimes, les nationalités et lieux de résidence des victimes et des accusés. « Il s’agit d’une marche arrière importante du parquet. C’est l’un des arguments que nous avons toujours avancé pour dire que la Belgique n’était pas compétente pour poursuivre M. Sharon », a réagi Me Adrien Masset, l’avocat belge d’Ariel Sharon. Le directeur des affaires européennes du ministère israélien des Affaires étrangères, Daniel Shek, a pour sa part souhaité que « le 26 juin soit porteur d’une bonne nouvelle » et que s’achève une affaire qui « pollue les relations entre Israël et la Belgique ».
S’il plaide l’abandon des poursuites contre le Premier ministre israélien, le parquet de Bruxelles juge en revanche recevables celles engagées contre un autre responsable de l’État hébreu, Amos Yaron, actuellement directeur du ministère israélien de la Défense. « L’instruction peut se poursuivre à l’encontre d’autres personnes visées par la plainte, dont Amos Yaron », a déclaré l’avocat général Morlet. Un point de vue dont s’est félicité Me Michael Verhaeghe, l’un des avocats des plaignants palestiniens, qui s’est dit « conforté par l’attitude du parquet ». Ariel Sharon était à l’époque le ministre israélien de la Défense. Il avait été forcé par la suite de démissionner. Amos Yaron était, pour sa part, général de brigade dans l’armée israélienne. La chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Bruxelles n’est pas tenue de suivre l’avis du parquet. Le 16 avril, elle avait, contre son avis, annulé les poursuites visant M. Yerodia, estimant que la loi « compétence universelle » ne pouvait s’appliquer que lorsque l’accusé peut être « trouvé sur le territoire belge ».

L'Orient-le Jour du 16 Mai 2002.


20 ans après, Sharon, metteur en scène préféré des producteurs Hollywoodiens
vient de tourner à Jénine, Sabra et Chatila n°2, la première page honteuse de l'Histoire militaire du XXIème siècle


Photos empruntées à l'AFP pour la bonne cause...

Dossier à lire en tenant compte de l'attentat mortel contre
Elie Hobeika à Beyrouth, le 24 Janvier 2002.


Le Communiqué des Avocats des victimes
du 14.02.2002
dans l'attente de la décision de la Cour d'Appel de Bruxelles le 6 Mars 2002


Bientôt 20 ans: pour que le devoir de mémoire s'applique à tous !


Galerie de Photos choc


Libanvision.com
a décidé à sa façon d'entretenir le souvenir de cette page terrible de la période de la guerre Libanaise à travers une sélection d'articles de presse récents.
Que chacun se fasse ou garde son opinion, notre but est déjà de rappeler à tout un chacun que Sabra et Chatila sont deux quartiers de la Banlieue Sud à deux pas du Centre-Ville de Beyrouth, ou était installé un des principaux camps de réfugiés Palestiniens dont un grand nombre- sans doute plusieurs milliers -furent assassinés.Cet évènement porte désormais le terme générique de Massacre de Sabra et Chatila.Nul n'en conteste la lourde réalité des faits.Près de vingt ans se sont écoulés et le contexte régional actuel engendre quelques rebondissements autour de ce fait historique.
Entre mémoire et prospective
, notre démarche vise d'abord à mieux connaitre et peut-être juger la portée de cet évènement humainement tragique.


Février 2001

Retour à Sabra et Chatila
En septembre 1982, les Forces libanaises massacraient plusieurs milliers de Palestiniens réfugiés dans les camps de Sabra et Chatila, au sud de Beyrouth, avec la bénédiction d’Ariel Sharon. Des rescapés se souviennent.

NIHAD HAMAD a quarante-deux ans aujourd’hui. D’une voix étrangement posée, elle raconte, dans le moindre détail, comme si cela s’était passé hier, le cauchemar des réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila en ces journées des 14, 15, 16 et 17 septembre 1982. De ces horribles massacres, la commission israélienne d’enquête Kahane a, en février 1983, soit six mois plus tard, rejeté la responsabilité indirecte sur l’ensemble de la chaîne de commandement israélienne, en particulier le ministre de la défense d’alors, Ariel Sharon, aujourd’hui premier ministre élu. Sur ses ordres, en effet, l’armée israélienne avait, pour la seule fois à ce jour, occupé une capitale arabe, Beyrouth, avec pour objectif de bouter l’Organisation de libération de la Palestine hors du Liban. Après le meurtre, mardi 14 septembre 1982, du président élu libanais Bechir Gemayel, qui était l’ami des Israéliens, M.Sharon et les chefs de l’armée avaient autorisé les milices chrétiennes des Forces libanaises à pénétrer à Sabra et Chatila, dans la banlieue sud de Beyrouth, pour déloger deux mille combattants prétendument restés sur place après l’évacuation de l’OLP. De combattants il n’y en avait point. L’affaire tourna à la tuerie de civils. « J’avais vingt-trois ans », raconte Nihad, qui habite toujours à Chatila, à quelques centaines de mètres de la rue où le plus grand nombre de civils ont été tués. « Mercredi, après le meurtre de Bechir Gemayel, l’aviation israélienne s’était livrée à des raids fictifs. Les gens avaient peur. On avait le sentiment d’être sans protection. L’OLP était partie. Où pouvions-nous aller? On était sûr qu’on nous ferait payer le meurtre de Bechir. Très vite le meurtrier a été arrêté. C’était un libanais. On ne s’était pas trompé. L’armée israélienne a assiégé le camp et dans la nuit de mercredi, et encore jeudi matin, ils ont essayé de pénétrer du côté est. Nos combattants étaient partis. Il n’y avait plus ici que des jeunes de quinze-seize ans. Ils bouillonnaient. Il y avait parmi eux un Libanais de Tripoli qui savait qu’il y avait une cache d’armes. Il leur a distribué des armes légères parce que les gens ne voulaient pas mourir sans se défendre. Ils se sont spontanément mobilisés et nous aussi. Nous leur apportions de l’eau et de la nourriture. » « Dans la nuit du jeudi, les bombardements ont redoublé d’intensité, poursuit Nihad. Nous avons vite compris que les armes légères n’y pourraient rien. Alors les jeunes ont décidé de dynamiter la cache d’armes, histoire de faire croire aux Israéliens que le camp pouvait résister. Ce sont des choses que peu de gens savent », insiste Nihad. « Entre l’explosion du dépôt et les bombardements israéliens, c’était l’apocalypse. On s’est tous réfugiés dans les abris. Mais on avait peur. Alors les notables, les gens les plus âgés ont décidé d’aller dire aux Israéliens que le camp se rendait. Ils ont pris un chiffon blanc et ils sont partis en voiture. Ils ne sont jamais revenus. Les jeunes en armes, qui allaient dans la même direction, ne revenaient pas non plus, pas plus que ceux qui allaient à leur recherche. On a alors compris qu’il valait mieux quitter les lieux. » Nihad raconte ensuite l’enfer des bombardements, les tirs de fusées éclairantes – « On aurait pu ramasser une aiguille dans la poussière », dit-elle –, la fuite éperdue de centaines de personnes vers une salle commune, à la périphérie nord du camp – « nous étions si nombreux qu’on en étouffait presque ». Elle parle du retour chez soi, au petit matin, dans un camp «plongé dans un silence de mort, une ville fantôme ». Les bombardements avaient cessé, « on entendait parfois quelques tirs isolés, au coup par coup. Puis, déchirant le silence, les hurlements d’une femme, du côté de la mosquée.» Elle avait les cheveux en bataille, les vêtements déchirés couverts de sang, l’air d’une folle. Ses enfants, disait-elle, « ont été égorgés sur ses genoux. Elle ne savait pas à qui ni à quoi elle devait elle-même la vie…» . A quoi les gens ont-ils reconnu les miliciens des Forces libanaises? « Ils avaient l’insigne du cèdre sur l’épaule, parlaient l’arabe avec un accent libanais et s’interpellaient. Leurs noms n’étaient pas juifs », répond Nihad. Y avait-il aussi des Israéliens? « Ils leur assuraient un cordon de sécurité, dit-elle. Eux sont entrés et ont sévi, au couteau et à l’arme blanche pour que le massacre se déroule en silence. Les gens se sont mis à crier, à parler d’une tuerie dans le quartier occidental. On a pris la fuite. Des voisins qui étaient restés chez eux ont été tués. On nous a dit que mon cousin était blessé, qu’il était à l’hôpital de Gaza. On y est allé. C’était noir de monde. Des enfants, des femmes, des hommes avaient été la cible de francs-tireurs. Mon cousin a été évacué avec d’autres vers des hôpitaux de Beyrouth-Ouest grâce à la Croix-Rouge. Il a eu de la chance car les miliciens, après en avoir fini dans le camp, sont allés terminer leur sale besogne à l’hôpital de Gaza. Ils ont tué et emmené des blessés, des médecins et des infirmiers. » Nihad n’en a pas fini. Elle raconte la fuite des siens, un chiffon à la main et la peur au ventre, vers les quartiers ouest de Beyrouth occupés par Tsahal. Elle raconte l’asile offert pour une nuit « dans son garage et à condition de ne laisser filtrer aucun signe de vie » par une « connaissance libanaise». Elle raconte le refus des gens de croire au massacre jusqu’à ce que les radios en parlent; elle raconte la recherche d’un nouvel abri le lendemain; elle parle de «gens enterrés vivants», de «la disparition» d’autres dont on n’a jamais retrouvé la trace. «On a parlé de 3000 à 3500 victimes, dit-elle, à cause de tous ces non-retrouvés. Le problème, c’est qu’il n’y avait aucun référent pour dresser un bilan exhaustif.» « On dit que 1500 victimes sont aujourd’hui ensevelies dans le terrain vague baptisé cimetière des Martyrs de Sabra et Chatila, à l’entrée sud du camp, dit Abou Moujahed, qui était alors secrétaire du comité populaire du lieu et qui dirige aujourd’hui un centre pour l’enfance. Mais nul ne connaît le nombre exact des victimes. Il n’y avait pas uniquement des Palestiniens. Il y avait aussi des Libanais de Tripoli, de la Bekaa, du Sud. J’ai eu moi-même connaissance d’un Syrien venu rapatrier le corps d’un parent. Des familles ont elles-mêmes enterré des corps. D’autres ont été ensevelis au cimetière des Martyrs à Beyrouth-Ouest. Il y avait les victimes visibles, parce que laissées à découvert, mais il y en a eu d’autres, mortes sous les décombres de leurs habitations. Les gens parlent aujourd’hui du quartier ouest, mais certaines personnes ont été enlevées au cœur du camp. J’en connais deux, les frères Mohamad et Aberd El Saga. Sans oublier que des massacres ont eu lieu du côté sud du camp. » KHADIJA KHALIB a perdu, elle, dix membres de sa propre famille: sa mère, sa sœur et les huit enfants de cette dernière. « Je les avais pourtant mis à l’abri, dit-elle, à Beyrouth-Ouest. Mais mes parents étaient des gens simples; ils ont remis leur sort entre les mains de Dieu et sont rentrés chez eux sans me prévenir. J’avais de leurs nouvelles par des gens qui venaient du camp. Ce jour-là ce devait être le 17 septembre, j’ai acheté trois journaux à la fois. Les massacres faisaient la manchette, avec une photo des victimes. Aucune mention de noms. J’ai eu comme un pressentiment. Là, sous la couverture, sur la photo, c’était ma mère.» « Nous nous sommes précipitées, une autre sœur et moi, vers le camp. Mais à l’entrée mes jambes ne me portaient plus. Je n’avais pas le courage d’avancer entre une haie de corps, de personnes tuées d’une horrible manière. Les gens fuyaient encore. On parlait de nouveaux massacres. Ma sœur y est allée. Je m’en voulais de la laisser partir seule et je me suis évanouie… Ma mère avait bien été tuée. Ma sœur et ses enfants aussi. » Les massacres de Sabra et Chatila ont coûté à Ariel Sharon son poste de ministre de la défense. La commission Kahane l’a de fait accablé et a vivement critiqué huit autres dirigeants israéliens, principalement le chef d’état-major, le chef du Mossad, mais aussi le premier ministre d’alors, Menahem Begin. Quant au général Sharon, « il est impossible, a jugé la commission, de justifier de la part du ministre de la défense l’ignorance du danger ». Non seulement M.Sharon s’est abstenu, pendant deux jours, d’informer M.Begin de ce qui s’est passé, mais il porte, selon elle, « la responsabilité de n’avoir pas donné les ordres appropriés pour que soient réduits les risques que comportait l’intervention des phalangistes c’est-à- dire les Forces libanaises » dans le camp. Ces ordres « auraient dû être la condition du feu vert accordé à l’opération », ont insisté les membres de la commission, compte tenu du fait que, après sept années de relations suivies entre les milices chrétiennes et les dirigeants israéliens, ceux-ci auraient dû savoir à quoi s’en tenir. Les responsables du Mossad en particulier savaient, selon la commission, que les phalangistes voulaient «éliminer le problème palestinien au Liban, (…) au besoin en ayant recours à des méthodes inqualifiables ». Soulignant que « le ministre de la défense n’a pas rempli son devoir », la commission l’invitait à « tirer lui-même les conséquences de ses erreurs ». Le 11 février 1983, M.Sharon présentait sa démission. Le rapport Kahane nommait en toutes lettres le responsable du groupe de miliciens chrétiens entré dans Sabra et Chatila. Il s’agit d’Elie Hobeika, qui était au poste de commandement avancé installé par les forces israéliennes sur le toit d’un immeuble distant de deux cents mètres seulement des limites du camp de Chatila. C’était de là que M.Sharon et le chef d’état-major de l’armée israélienne supervisaient l’occupation de Beyrouth-Ouest, après l’assassinat de Bechir Gemayel. C’était aussi de là que M.Hobeika dirigeait les opérations de ses hommes. Ses ordres, qui ne laissaient aucun doute sur ses intentions, soulignait la commission d’enquête israélienne, ont été rapportés au fur et à mesure et sur-le-champ par des officiers israéliens au chef d’état-major, qui n’en a tenu aucun compte. Mais au Liban, on a refusé en bloc les conclusions de la commission d’enquête israélienne et rejeté sur Tsahal seule la responsabilité des massacres. M.Hobeika n’a jamais été inquiété, voire a été longtemps ministre après la fin de la guerre civile en 1990. Devenu, il y a quelques années, très proche de la Syrie, il coule des jours tranquilles au Liban. L’ACCESSION de M.Sharon au poste de premier ministre en Israël ne fait ni chaud ni froid à Nihad et Khadija. Pour elles, d’autres dirigeants israéliens « n’ont rien à lui envier en matière de crimes »<. « N’est-ce pas Ehoud Barak le premier ministre sortant qui est responsable aujourd’hui des dizaines de morts de l’Intifada? Et Shimon Pérès ne doit-il pas être tenu pour responsable de la mort de 107 civils libanais à Qana » en 1996, lors de l’opération dite «Raisins de la colère», interroge Nihad? A ses yeux, tous les Israéliens se valent: « Les intermèdes pseudo-pacifistes ne servent qu’à permettre à l’Etat juif de reprendre son souffle avant de nouvelles batailles. » L’une et l’autre originaires de la région de Safad, elles ne rêvent que de «retour». La nouvelle Intifada et la détermination dont a fait preuve l’Autorité palestinienne en exigeant la reconnaissance par Israël du droit au retour des réfugiés leur ont mis du baume au cœur et ravivé leurs espoirs. «Je marche la tête dans les nuages», assure Nihad. Lorsque l’armée israélienne a achevé son retrait du sud du Liban, le 24 mai 2000, Khadija est allée jusqu’à la frontière pour voir ElKhalsa, où elle est née. « S’il ne m’est pas donné de vivre jusqu’au “retour”, au moins l’aurai-je vue de loin », explique-t-elle, assise à la petite table de la minuscule épicerie remarquablement bien tenue qu’elle a ouverte dans le camp. « Si seulement je pouvais me rapprocher, aller chez mes deux sœurs qui vivent en Cisjordanie et à Gaza, soupire-t-elle. Ce n’est malheureusement pas possible avec une carte de réfugiée! » « Les gens, ici, explique Souhed Natour, membre du comité central du Front démocratique de libération de la Palestine, fondent un immense espoir dans l’Intifada. » On n’en est certes pas là. Pour l’heure, Sabra et Chatila, qui n’ont jamais été un havre de prospérité et où les conditions de vie ont toujours été à la limite de la décence, sont aujourd’hui un quart-monde surpeuplé où se côtoient Palestiniens, Libanais déshérités, Syriens, Asiatiques, Ethiopiens – tous travailleurs immigrés –, bref un échantillon des malchanceux de ce monde, selon l’expression d’Abou Moujahed. Beaucoup de Palestiniens sont partis d’ici pour l’étranger, pour un autre camp ou pour un quartier populeux de Beyrouth, parce que 1982 n’a pas sonné la fin des drames. Il y eut, trois ans plus tard, ce que l’on a appelé la «guerre des camps» conduite par la milice libanaise chiite, Amal, avec son cortège de nouvelles destructions et de victimes. Et puis il y a toutes les restrictions imposées par les autorités libanaises aux réfugiés, qui les empêchent de gagner décemment leur vie. « On ne vit pas, on survit, dit Khadija. Les morts, ce ne sont pas seulement ceux qui sont sous terre. Il y a aussi des morts vivants. »

Mouna Naïm

 


Juin 2001

Sabra et Chatila : la responsabilité d'Ariel Sharon
La question de la responsabilité du premier ministre israélien, Ariel Sharon, dans les massacres des camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila, en septembre 1982 au Liban, a été relancée par une émission – vivement contestée en Israël – de la télévision britannique BBC. Quasi simultanément, une plainte a été déposée en Belgique par un avocat libanais au nom de vingt-trois rescapés desdits massacres.

Une émission de télévision contestée, une plainte pour crime contre l'humanité et une nomination inattendue : depuis quelques jours, Israël est confronté à la partie la plus noire d'un passé qui n'en finit pas de peser sur son avenir. C'est la BBC qui a ouvert le feu en diffusant, dimanche 17 juin, une émission consacrée aux massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila, au Liban, en septembre 1982. Quelque 800 réfugiés palestiniens, essentiellement des femmes, des enfants et des vieillards, y avaient été massacrés par les milices chrétiennes, alors que Beyrouth était encerclée par les forces israéliennes. Ariel Sharon, à l'époque ministre de la défense, avait donné son assentiment à l'entrée des milices dans les camps, qu'il s'agissait de "nettoyer" de leurs combattants. Le massacre avait provoqué une immense émotion en Israël, où, quelques mois plus tard, une commission d'enquête dirigée par le président de la Cour suprême, Itzhak Kahane, avait estimé que, en ne prévoyant pas ce qui, d'évidence, allait se passer, Ariel Sharon portait "une responsabilité personnelle" dans la tragédie. Sans exiger de poursuites judiciaires, la commission avait demandé que le ministre "tire les conclusions personnelles qui découlent de la manière dont il avait manqué aux devoirs de sa charge". Quelques jours plus tard, Ariel Sharon démissionnait de son poste de ministre de la défense.

EMBARRAS DIPLOMATIQUES

L'émission de la BBC, opportunément intitulée "L'Accusé", n'apporte rien de nouveau au plan des faits, insistant surtout sur cette fameuse "responsabilité morale" qui, selon plusieurs des témoins interrogés, devrait conduire Ariel Sharon devant un tribunal pour y répondre de l'accusation de crime contre l'humanité. Lundi, le ministère israélien des affaires étrangères a vivement réagi, accusant la BBC de s'ériger en "tribunal télévisé", en diffusant des commentaires "partiaux" et "injustes". Il y a trois semaines déjà, la BBC avait fait l'objet d'accusations similaires lorsqu'un de ses journalistes en poste à Gaza avait prononcé quelques mots de solidarité lors d'une cérémonie organisée par le Hamas. Pour les responsables israéliens, l'émission ne doit rien au hasard, retombée, selon eux, du conflit israélo-palestinien et des polarisations partisanes qu'il provoque au sein de l'opinion publique internationale. De fait, depuis plusieurs mois, diverses organisations militantes proches des Palestiniens étudient l'opportunité de faire poursuivre Ariel Sharon, à la lumière des procès engagés contre Augusto Pinochet ou contre les responsables des massacres balkaniques. Lundi, l'avocat libanais d'un groupe de vingt-trois rescapés des massacres de Sabra et Chatila, Me Chibli Mallat, a déposé à Bruxelles une plainte contre Ariel Sharon dans l'espoir de le faire accuser de crime contre l'humanité. Depuis 1993, une loi belge autorise n'importe quel juge du pays à instruire les plaintes pour crime contre l'humanité ou crime de guerre, quel que soit le lieu où ils ont été commis et quelle que soit la nationalité des victimes ou des accusés. C'est ce texte qui a permis la récente condamnation de deux religieuses rwandaises, poursuivies pour complicité dans les massacres commis dans leur pays. Le ministre belge des affaires étrangères, Louis Michel, a déjà annoncé qu'il convenait de réduire la portée d'une loi susceptible de créer bien des embarras diplomatiques. "Que se passerait-il si un plaignant poursuivait devant les tribunaux belges M.Chirac, qui a servi durant la guerre d'Algérie où des massacres ont été commis par l'armée française ?", expliquait un haut fonctionnaire israélien pour illustrer les risques d'une loi unique en son genre. Israël, cependant, n'a pas besoin de la Belgique pour débusquer les fantômes du passé. A l'initiative du Comité israélien contre la torture, plusieurs organisations humanitaires tentent de bloquer la nomination de Carmi Gillon comme ambassadeur d'Israël à Copenhagen. Proche du Parti travailliste et directeur du Centre Pérès pour la paix, Carmi Gillon fut chef du service de sécurité intérieure (Shin Beth) du temps d'Itzhak Rabin. Reconnaissant les défaillances de son service, il avait démissionné après l'assassinat du premier ministre. Il est aujourd'hui accusé d'avoir couvert les techniques musclées utilisées par ses services lors des interrogatoires de militants ou de terroristes palestiniens. Après des années de batailles juridiques, la Cour suprême, l'année dernière, a interdit les techniques d'interrogatoire musclé jusqu'ici défendues bec et ongles par les services israéliens.

Georges Marion

 

Sabra et Chatila -
La plainte contre Sharon provoque un tollé diplomatique - Chebli Mallat : Un dossier solide, loin de toute politique

Le processus semble s’emballer. En une semaine, le Premier ministre israélien Ariel Sharon annule la visite prévue en Belgique mais envoie dans le plus grand secret une équipe chargée d’enquêter sur la plainte déposée contre lui ; le consulat belge à Tel-Aviv est attaqué par des jeunes extrémistes ; l’ancien ministre Élie Hobeika propose de témoigner devant la justice belge ; et le ministre belge des AE, Louis Michel, se déclare «embarrassé» par l’action en justice contre Sharon. À l’origine de ce bouleversement, un avocat libanais, Chebli Mallat, marqué depuis longtemps par les massacres de Sabra et Chatila – comme par tous les génocides d’ailleurs – et soucieux de voir un jour s’instaurer une justice universelle qui dépasse les enjeux politiques. Ce qui, au Liban, semble être une affaire de propagande, est en réalité une plainte très grave et un dossier solide qui risquent de causer de sérieux ennuis au Premier ministre israélien. Ce dernier est suspendu à la décision du juge d’instruction Patrick Collignon, connu pour son courage, puisque c’est lui qui avait brisé le réseau de pédophilie en Belgique, sans craindre de remonter haut dans la filière. Depuis que le parquet belge a jugé recevable la plainte déposée par Me Chebli Mallat et ses deux collègues belges MM. Luc Walleyn et Michael Verhaeguen au nom de 28 survivants du massacre de Sabra et Chatila, la justice belge est sur la sellette. Tous les jours, les médias européens, arabes et israéliens – pour les Américains, c’est une autre histoire – rapportent de nouveaux détails sur cette affaire et de plus en plus d’organisations internationales des droits de l’homme appuient cette initiative, qui annonce l’émergence d’une sorte de justice universelle, équitable pour tous les humains. Au départ, il y a un jeune homme, docteur en droit, spécialiste en droit pénal international. En 1982, le jeune Chebli Mallat vient d’achever ses études de droit à l’USJ. Il assiste à une véritable guerre, à l’occupation d’une capitale arabe, et découvre que la responsabilité de ces actes est uniquement politique. Il suit aussi la gigantesque manifestation de 400 000 personnes à Tel-Aviv réclamant la formation d’une commission d’enquête sur les massacres de Sabra et Chatila. Trois mois plus tard, la commission publie ses conclusions et demande la démission d’Ariel Sharon. Ce dernier refuse. Il faudra une autre manifestation le 10 février 83 pour qu’il renonce au portefeuille de la Défense. Au cours de cette manifestation, d’ailleurs, l’actuel président de la Knesset Avraham Burg est blessé par une grenade. Le jeune diplômé en droit est marqué par tous ces événements et découvre comment Ariel Sharon réussit à créer un flou autour de son rôle dans les massacres de Sabra et Chatila, alors que la commission Kahane avait elle-même conclu à sa responsabilité personnelle. Le juge d’instruction décidera s’il doit entendre Hobeika L’idée d’engager la responsabilité pénale de ce chef a commencé à faire son chemin dans l’esprit du jeune avocat. D’autant que depuis les massacres contre les Kurdes, les Bosniaques et les Kosovars, de plus en plus de voix se sont élevées dans le monde pour réclamer une justice internationale. Le TPI pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda a été créé alors qu’une cour pénale internationale est en gestation. Autant d’éléments qui encouragent le jeune avocat à commencer à former un dossier. Le déclic est arrivé avec l’adoption par le Parlement belge en 1999 de la loi sur la compétence universelle, qui permet à la justice belge de traiter des dossiers internationaux s’ils portent sur des crimes contre l’humanité. Le principe est simple et il a été reconnu lors du procès Eichman qui a constitué une jurisprudence en la matière : certains crimes sont tellement odieux qu’ils concernent l’humanité entière et par conséquent ne peuvent faire l’objet d’une prescription ou d’une juridiction territoriale. Les tribunaux belges peuvent donc les juger. Des Rwandais ont aussitôt porté plainte contre les auteurs des massacres dans leur pays et la justice belge a condamné quatre «génocidaires» rwandais à des peines allant jusqu’à 20 ans de prison. Il n’en fallait pas plus pour que Me Chebli Mallat se décide à suivre la même voie. Avec l’aide de l’historienne Rosemary Sayegh et de l’enquêtrice palestinienne Sana Hussein, il a recueilli plusieurs témoignages et finalement porté plainte contre Ariel Sharon, Amos Yaron (de l’état-major israélien) et «tout responsable israélien ou libanais dont l’enquête prouvera la responsabilité dans ces massacres» auprès de la justice belge. La conférence de presse que Mallat a tenue à Bruxelles avec ses collègues belges pour annoncer le dépôt de cette plainte a attiré la presse du monde entier qui, depuis, s’intéresse de près à cette affaire. À tel point que la Belgique, qui préside depuis peu l’Union européenne, est assez embarrassée, le ministre des AE Louis Michel ayant dû se rendre in extremis en Allemagne pour y rencontrer le Premier ministre israélien qui a annulé l’escale belge de sa tournée européenne. Que peut-il se passer maintenant ? Il fait attendre la décision du juge d’instruction. C’est lui qui verra s’il peut recueillir le témoignage de l’ancien ministre Élie Hobeika. À ce niveau, Me Mallat estime que la proposition de ce dernier de se rendre en Belgique est très intéressante parce qu’elle peut apporter de nouveaux éléments au dossier. Mais en ce qui le concerne, il estime avoir assez d’éléments pour incriminer le Premier ministre israélien. «Si l’affaire n’était pas sérieuse, la presse israélienne ne la suivrait pas si attentivement». Mallat se désole toutefois du black-out fait par la presse américaine, alors que l’association US Human Rights Watch s’est prononcée en faveur d’un jugement de Sharon. Il se rend d’ailleurs lui-même à Paris et à Londres, à l’invitation d’associations des droits de l’homme, pour expliquer son initiative. Selon lui, le juge belge peut très bien émettre un mandat d’arrêt secret à l’encontre du Premier ministre israélien, même s’il estime que cette hypothèse est assez improbable pour l’instant. Ce qui compte aujourd’hui, c’est que l’instruction suive son cours, même si celui-ci prendra du temps et qu’un jour, les auteurs de crimes contre l’humanité se retrouvent sous les verrous. Ne craint-il pas que la justice belge ne décide de clore le dossier pour des raisons politico-diplomatiques ? «Le principe de la séparation des pouvoirs est en vigueur en Belgique. C’est l’occasion de montrer combien il est respecté». Le ministre belge des AE réclame un amendement de la loi de 1999, excluant au moins les responsables en exercice ? «Cette loi avait été votée à l’unanimité et les parlementaires belges en sont très fiers. Je ne sais pas s’ils seront nombreux à voter un amendement». Mallat est convaincu que la plainte aboutira. L’idée de la justice universelle et sans frontières fait de plus en plus son chemin dans le monde. «En tout cas, je fais mon devoir. Si j’obtiens gain de cause, cela signifiera qu’il existe un État de droit international. Sinon, il faudra continuer à se battre». Sa grande peur est que l’affaire ne se politise. C’est d’ailleurs pourquoi il a refusé l’aide du gouvernement libanais. «Lorsque le juge d’instruction belge viendra enquêter à Beyrouth, les autorités pourront l’aider. Mais à ce stade, je ne souhaite pas leur intervention. Pour moi, il s’agit d’une question de droit et de responsabilité pénale». Sharon n’est pour lui qu’un nom parmi d’autres. «Des Khmers rouges à Pinochet, en passant par Sharon, pour moi, la justice doit être égale pour tous et ce genre de crimes ne doit pas rester impuni». Mallat reconnaît toutefois qu’en présentant cette plainte, il y avait peut-être, dans son inconscient, une volonté de contribuer à la relance du processus de paix en se demandant comme un homme au bagage aussi lourd pouvait prendre en charge les destinées d’un peuple voire d’une région. En tout cas, il a le mérite d’avoir soulevé un vent d’espoir dans les cœurs des survivants de Sabra et Chatila, et peut-être dans les consciences des peuples du monde.

Scarlett HADDAD

La FIDH soutient la plainte déposée contre Ariel Sharon en Belgique


01- 12 - 2001

LA FÉDÉRATION internationale des droits de l'homme (FIDH) a étudié, l'été dernier, l'éventualité de se joindre à la plainte déposée, à Bruxelles, contre le premier ministre israélien, Ariel Sharon, par vingt-trois survivants ou membres de familles de disparus du massacre de Sabra et Chatila, à Beyrouth, en septembre 1982. M. Sharon était alors ministre israélien de la défense. La FIDH a finalement décidé de ne pas s'y associer, à cause des écueils juridiques qu'une telle action aurait dû surmonter en Belgique. Comme pour bien signifier que l'attitude de la FIDH n'était dictée par aucun autre motif, Me Patrick Baudouin, son président d'honneur, a indiqué, lors d'une conférence de presse, vendredi 30 novembre, qu'il apportait "tout son soutien" à la plainte contre M. Sharon, la FIDH étant "engagée depuis longtemps dans la lutte contre l'impunité".

"L'EXEMPLARITÉ BELGE"


Répondant implicitement à Ariel Sharon, qui avait estimé que le procès concernait "le peuple juif tout entier", Me Baudouin a indiqué que, malgré "l'émotion"soulevée par l'affaire, il était essentiel de s'en tenir à ses seuls aspects juridiques. "C'est un homme qui est poursuivi, (...) ce n'est pas le peuple israélien", a-t-il déclaré, citant en exemple les poursuites engagées à titre individuel par d'autres juridictions contre des chefs d'Etat, tels le Yougoslave Slobodan Milosevic ou le Tchadien Hissène Habré. A ceux qui cherchent à faire amender ou abroger la loi belge de 1993 portant sur la "compétence universelle" de ses tribunaux, ou ceux qui craignent, au vu de la trentaine d'actions intentées en Belgique depuis que celle contre Ariel Sharon a été jugée recevable, que les tribunaux soient vite incapables de faire face à un afflux de plaintes, le président de la FIDH a rétorqué qu'il fallait au contraire applaudir à "l'exemplarité de la Belgique" et exiger des autres Etats membres de l'Union européenne qu'ils adoptent une loi similaire, afin de pouvoir juger tout auteur présumé de "crimes de guerre", de "crimes contre l'humanité"ou d'actes de "génocide".

Récusant l'argument parfois entendu de "partialité politique"de la plainte, qui se concentre sur Ariel Sharon alors que les exécutants libanais présumés du massacre de Sabra et Chatila (Elias Hobeika, principal agent de liaison avec les Israéliens, ainsi que les chefs des milices chrétiennes, Emile Id, Michel Zouein, Dib Anastase, Maroun Michalani et d'autres) ne sont pas spécifiquement désignés par les plaignants, leur défenseur, Me Luc Walleyme, a rappelé que la plainte était déposée contre "Ariel Sharon, -le général israélien- Amos Yaron et autres", sans limitation. Il a ajouté qu'au vu des preuves amassées les plaignants se sont, il y a deux semaines, "constitués partie civile" contre Elias Hobeika (qui fut ministre au Liban de 1991 à 1998).
Autre défenseur, Me Michael Verhaeghe a dévoilé avoir reçu "de source anonyme, mais sans doute de l'intérieur, copie de documents et de notes du Mossad -services de renseignement israélien- qui font ressortir" le contrôle qu'exerçait l'armée israélienne sur les milices chrétiennes "avant, pendant et après le massacre" et rendent le système de défense d'Ariel Sharon "pas crédible". Me Baudouin et les avocats belges ont enfin exprimé l'espoir que l'enquête judiciaire sur les responsabilités d'Ariel Sharon permettrait de faire toute la lumière sur les "disparus" des camps de Sabra et Chatila. Hormis 800 victimes identifiées, le sort de 1 000 à 2 000 réfugiés du camp n'a jamais été élucidé.

La chambre de mise en accusation de Bruxelles devrait prononcer le 23 janvier 2002 son arrêt sur la validité de l'instruction (les défenseurs d'Ariel Sharon invoquent à la fois l'immunité et la prescription des faits) et l'ouverture d'une enquête sur les responsabilités dans ce massacre.


Sylvain Cypel



Liens Utiles:


Suivi de la plainte déposée en Belgique contre M.Ariel Sharon
sur le site de Maitre Chibli Mallat

Soutien à la plainte déposée par les rescapés de Sabra et Chatila contre M.Sharon

Dossier Paix en Palestine

Notre Dossier de Synthèse sur la Présence des Palestiniens au Liban.

Le Contexte Régional du Proche-Orient :
Comment a t-on pu en arriver à de telles atrocités?

Un site engagé avec des Photos choc et l'histoire d'autres massacres...

Bibliographie sur la Guerre du Liban


Réecouter une bonne émission- débat de Radio-France / France-Culture sur la guerre du Liban et les massacres

>>> A paraitre:
fin 2002, un nouveau livre d'Alain Ménargues grand reporter de Radio France et correspondant durant guerre au Liban; il annonce y apporter des éléments tangibles impliquant directement Tsahal dans le Massacre de Sabra et Chatila.