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Tournée européenne pour le metteur en scène de théâtre d'origine libanaise
Wajdi Mouawad
Wajdi Mouawad : le théâtre comme antidote à l'exil

Littoral de Wajdi Mouawad au festival d'Avignon 2009


La folle exubérance de Wajdi Mouawad embarque le public de la cour d'Honneur dans un voyage puzzle. Un périple extravagant auquel un joli chat tigré qui, mercredi soir, a traversé l'immense plateau,a brièvement contribué. On part pour onze heures de théâtre et d'émotions, porté pas la sensation exaltante de participer à l'un de ces marathons qui ont tissé l'histoire du festival.

Ce voyage sur une scène nue nous emmène, avec autant de sensibilité et d'humour, dans des pays chavirés par la guerre ou au coeur de familles en crise. Elles sont fissurées par le deuil, rongées par les secrets enfouis, tout en questionnement. Ainsi croise-t-on d'abord dans Littoral, Wilfrid (Emmanuel Schwartz). Un appel téléphonique est venu troubler les jeux sexuels de ce grand échalas en même temps qu'il lui apprenait la mort de son père. C'est comme ça, dans les pièces de Wajdi Mouawad, l'essentiel se fige souvent autour de l'anecdotique. Les accents se mélangent, l'imaginaire s'invite dans le réel, tel le chevalier Guiromelan (Jean Alibert), créé par Wilfrid enfant pour mieux lutter contre la puissance des monstres et qui, depuis, ne l'a pas quitté.

On rit autant que l'on pleure. Avec ces jumeaux réunis pour entendre le testament de Nawal, leur mère (jouée par trois femmes d'âges différents) dans Incendies. Sur le plateau, peu d'artifices. Avec quelques pots de peinture, on dessine la mer, on raconte un accouchement, on offre une sépulture à un père.

Sion somnole avec Forêts, cette perte de contrôle joue avec les tableaux agités de Wajdi Mouawad, les sublime. Un voyage initiatique, drôle et douloureux. Olga Bibiloni pour La Provence

Les 10; 11 et 12 juillet à 20h dans la cour d'Honneur à Avignon. 04 90 14 14 14.

Wajdi Mouawad honoré par l'Académie française

26 Juin 2009- À quelques jours de l'ouverture du Festival d'Avignon, dont il est l'artiste-associé et une des grandes vedettes, Wajdi Mouawad voit son oeuvre saluée par l'Académie française.

Réunis cette semaine, les membres de la célèbre institution du Quai Conti lui ont décerné leur Grand Prix du Théâtre pour l'ensemble de son oeuvre dramatique. La récompense sera remise à l'auteur, metteur en scène et comédien en décembre sous la Coupole de l'Institut de France.

C'est lors de sa séance de jeudi que l'Académie a procédé à l'attribution de ses différentes distinctions littéraires de l'année 2009. La liste est longue, et comprend pas moins de 70 prix (de littérature, de la nouvelle, de l'essai, de la biographie).

Les plus prestigieux sont les Grands Prix, à commencer par celui du roman dont le lauréat - comme d'habitude - ne sera désigné qu'à l'automne.

Le Grand Prix du Théâtre a été créé en 1980. Il est attribué chaque année à un auteur dramatique pour l'ensemble de son oeuvre. Dans le passé, la récompense a notamment été décernée à Jean Anouilh, Marguerite Duras, Rolland Dubillard et Valère Novarina.

Pour Wajdi Mouawad, ce grand prix ressemble à un avant-goût de la consécration qui l'attend vraisemblablement à Avignon, dont la prochaine édition s'ouvre le 8 juillet.

Considéré comme un des plus importants auteurs de la Francophonie, Wajdi Mouawad est l'artiste associé du festival. À ce titre, il en a largement «inspiré» la programmation.

Pour l'occasion, Mouawad présentera dans la prestigieuse Cour d'honneur du Palais des Papes la version intégrale de ses trois pièces Littoral, Incendies et Forêts, regroupées pour la première fois au sein d'un même spectacle qui se prolongera jusqu'à l'aube.

Présentée dans la seconde partie du festival, une nouvelle pièce, Ciels, viendra compléter cette trilogie, pour former un quatuor intitulé Le Sang des promesses.


Le Théâtre National de la Colline accueille du 8 octobre au 2 novembre 2008 le spectacle INCENDIES de Wajdi Mouawad
dans la mise en scène de Stanislas Nordey.

©DR
Wajdi Mouawad est né au Liban en 1968, pays qu’il quitte à l’âge de huit ans avec sa famille pour un premier exil à Paris. Huit ans plus tard toute la famille émigre au Québec où il obtient son diplôme de l’École Nationale de théâtre du Canada en 1991. Depuis septembre 2007, il est directeur artistique du Théâtre Français du Centre National des Arts à Ottawa et parallèlement s’associe avec sa compagnie française à l’Espace Malraux à Chambéry.

Le théâtre de Wajdi Mouawad est un théâtre de l’intime aux formes épiques, il brasse l’histoire avec un grand H et les histoires de vie d’êtres humains lancés malgré eux dans le tourbillon des haines, des guerres.

INCENDIES
Grand Théâtre
du 8 octobre au 2 novembre 2008
texte Wajdi Mouawad mise en scène Stanislas Nordey

Avec Claire Ingrid Cottanceau, Raoul Fernandez, Damien Gabriac, Charline Grand, Frédéric Leidgens, Julie Moreau, Véronique Nordey, Lamya Regragui,
Laurent Sauvage, Serge Tranvouez

Lorsque le notaire Lebel fait aux jumeaux Jeanne et Simon Marwan la lecture du testament de leur mère Nawal, il réveille en eux l'incertaine histoire de leur naissance : qui donc fut leur père, et par quelle odyssée ont-ils vu le jour loin du pays d'origine de leur mère ? En remettant à chacun une enveloppe, destinées l'une à ce père qu'ils croyaient mort et l'autre à leur frère dont ils ignoraient l'existence, il fait bouger les continents de leur douleur : dans le livre des heures de cette famille, des drames insoupçonnés les attendent, qui portent les couleurs de l'irréparable. Mais le prix à payer pour que s'apaise l'âme tourmentée de Nawal risque de dévorer les destins de Jeanne et de Simon.

du mercredi au samedi 20h30, mardi 19h30, dimanche 15h30

Tarif préférentiel pour les internautes de LibanVision: 19€ au lieu de 27€,
13€ pour les moins de 30 ans
Réservation 01 44 62 52 27 du lundi au vendredi de 9h30 à 17h30

CALENDRIER DES RENCONTRES AUTOUR DU SPECTACLE
« INCENDIES »

RENCONTRE/DEBAT
Grand Théâtre mardi 14 octobre 2008 à l’issue de la représentation

Rencontre/débat entre Gérard Mortier, directeur de l’Opéra national de Paris et Stanislas Nordey, metteur en scène.

entrée libre

réservation au 01 44 62 52 00 ou contactez-nous@colline.fr

CONFERENCE
Ecole Nationale Supérieur des Beaux Arts mercredi 15 octobre à 15h

Conférence de Stanislas Nordey, metteur en scène et Emmanuel Clolus, scénographe

ENSBA, 14 rue Bonaparte, 75006 Paris. Métro Saint Germain des Près

entrée libre

réservation au 01 44 62 52 00 ou contactez-nous@colline.fr

RENCONTRE
Grand Théâtre dimanche 19 octobre à l’issue de la représentation

Rencontre avec Stanislas Nordey et l’équipe artistique du spectacle

Animée par Cécile Roy, CRDP

entrée libre

RENCONTRE
Institut du Monde Arabe jeudi 30 octobre à 18h30

Lors de cette soirée, Wajdi Mouawad échangera avec deux journalistes des rédactions du Monde diplomatique et du Magazine littéraire autour de la situation du Liban, à partir de l’approche poétique et politique qui traverse son oeuvre.

entrée libre
réservation au 01 44 62 52 00 ou contactez-nous@colline.fr

Auditorium de l’IMA 1, rue des Fossés Saint-Bernard, Place Mohammed V
Paris 5e

Théâtre National de la Colline
15 rue Malte Brun 75 020 Paris
M° Gambetta

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Wajdi Mouawad
a choisi, pour la rencontre, le café du Quartier latin où il fit halte au cours d'une fugue, dans sa vie d'adolescent parisien. Comme si l'errance devait être inscrite d'emblée, avant même que ce garçon à l'allure sage ne commence le déroulé de sa vie - avant que l'on ne commence, comme Loup, l'héroïne de sa pièce Forêts, à essayer de recoller "les morceaux d'un puzzle éparpillé".
Wajdi Mouawad en tournée avec " Seuls " : soi-même comme bercail

Printemps 2008- Wajdi Mouawad, seul sur scène, seul avec son double ou ses " doubles ", toutes les éventualités, les possibilités d'un être. Celui qui serait resté à Beyrouth, enfant, adolescent, adulte, celui que son père aura transporté au Canada pour lui offrir une vie meilleure, le privant d'une langue, d'un jardin, d'un bonheur céleste.
Wajdi Halwan qui lutte pour être quelqu'un de bien, d'heureux, dans un pays en paix et qui trébuche sur l'absence de l'enfant qu'il a été, celui qui aimait la couleur, les étoiles et son chien - et dont on a omis d'emmener les jeux, les cadeaux de Noël, les tableaux qu'il avait lui-même peints, parce que ce n'était pas essentiel et que lorsqu'on part en exil, c'est l'essentiel
(mais quoi ? Des vêtements ? Les carnets scolaires ? Les livrets de vaccination ?)
qu'on prend avec soi.
À Montréal, dans le froid, Halwan rédige une thèse sur l'identité au travers de l'usage du cadre dans le travail de Robert Lepage, cinéaste et metteur en scène canadien. Tout son travail de recherche aura eu pour but de comprendre comment l'œuvre artistique parvient, à partir d'un cadre fini, à nous déposer ailleurs, à nous déplacer dans les infinies possibilités, dans ce qui a été de tout temps et qui se transformera pour donner sa couleur à tout ce qui advient.
Après avoir installé le décor (sa chambre nue, sans âme, avec fenêtre), la situation (un chagrin d'amour, une thèse sans conclusion, une sœur complice, un père qui l'attend souvent en vain les dimanches, à la fois aimant et exilé de ce qu'il aime), après avoir mêlé les langues, lutté contre la passivité, la colère, l'inaction, la neige à moins quarante, les mauvaises nouvelles, les imprévus, la tentation de rester couché, d'en vouloir aux autres - le père, la nouvelle patrie, le destin et les sillons arbitraires, raisonnables, étouffants de l'avenir, le personnage, l'auteur, la dramaturgie basculent au bout de près de deux heures, prennent leur envol. C'est quand le personnage se tait, enfin, que la pièce elle-même explose de son cadre et se transforme en ce que rien n'annonçait : une performance de plasticien. C'est subitement, tout simplement, incroyable. Un ballet qui consiste à donner couleur à un décor étonnant, un immense paravent dépliable à souhait, fabriqué aux ateliers du théâtre du Grand T à Nantes même et où se confondent les figures de Halwan, du fils prodigue peint par Rembrandt et de Mouawad qui se love ici dans le giron de son pays, explicitement, afin de se retrouver lui-même.
La brillance technique de son corps, de la scénographie, des lumières, de la peinture, nous amène forcément et cyniquement à nous demander s'il ne valait pas mieux vivre en exil, " produire " et avoir accès aux structures et au savoir-faire canado-européens plutôt que de rester à Beyrouth, durant toutes ces années de maturation, à écouter la même musique (Feyrouz, Abdel Wahhab et la musique originale d'assez mauvais goût signée Michael Jon Fink, le seul bémol !) qu'il nous a servie durant la pièce.
En tout cas, pour avoir établi un cadre parfait, une gestuelle forcenée, des découpages de lignes, de lumières, de sons, réglés au millimètre et à la seconde près, Mouawad parvient à offrir l'irremplaçable, la rare sensation d'échapper aux lois du temps et de l'espace. En peignant la pure affectivité, il se place en deçà de tout discours (identitaire, familial, nostalgique, national, artistique) et décide d'ignorer les bornes et les frontières, les limitations imposées, imaginées, illusoires, posées par les récits de la mémoire. Seule l'expression compte, la sortie de soi, trouver le vocabulaire originaire qui n'est pas celui des langues parlées. Cela seul permet de convoquer en un lieu et en un temps ceux que nous sommes, avons été et serons. On est moins seul, lorsqu'on revient à soi.

Caroline HATEM pour L'Orient Le Jour

* " Seuls ", une pièce de et avec Wajdi Mouawad au Grand T de Nantes.
En tournée jusqu'en janvier 2009 et au Festival d'Avignon.

Voir toutes les dates de la tournée
Il est devenu une présence essentielle au fil des saisons, par ses récits bouleversants, son monde prodigieux et effroyable, ses sagas magistrales – Incendies, Littoral, Forêts, Willy Protagoras enfermé dans les toilettes. Wajdi Mouawad a un pouvoir infini, celui d’une langue façonnée par le rêve et la révolte, par le regard entier de l’enfance. Celui aussi, d’une poésie impérieuse. Libanais d’origine, Français de formation et Montréalais d’adoption, le temps est venu pour ce conteur fabuleux aux multiples vies d’interroger ce que devient la langue maternelle lorsque tout se met à fonctionner à travers une autre langue. Comment faire, quand pour redevenir celui que l’on a été, il faut redevenir quelqu’un d’autre ? Seul sur scène, il ne pouvait être question d’un autre que lui-même pour incarner Harwan, étudiant montréalais d’une trentaine d’années, se retrouvant enfermé une nuit durant dans une des salles du Musée de l’Hermitage à Saint-Pétersbourg. La nuit sera longue, vertigineuse. Elle durera plus de deux mille ans et l’entraînera, à son insu, au chevet de sa langue d’origine depuis longtemps oubliée.

Parcours

1968
Naissance à Deir El-Kamar (Liban).

1978
Arrivée en France.

1983
Sa famille émigre au Québec.

1999
Création de "Littoral" à Montréal.

2005
Molière du meilleur auteur dramatique francophone pour "Littoral".

2006
"Forêts", au Théâtre 71 de Malakoff, jusqu'au 4 novembre.

Personne, dans son entourage, ne sait vraiment où vit Wajdi Mouawad. A Paris ? A Montréal ? A Toulouse ? Quand on lui pose la question, il répond qu'il vit "là où le travail le pousse" : à Paris - mais à quelle adresse, nul ne sait - tant que Forêts se joue à Malakoff. A Montréal, où il va remonter sa pièce Incendies. A Moscou, où on lui a commandé une mise en scène. A Bordeaux, où Dominique Pitoiset, le directeur du théâtre, lui a proposé d'écrire un texte pour lui. Et Toulouse ? Mystère.

"Il prend l'avion comme moi le métro", constate, amusé, Pierre Ascaride, le directeur du Théâtre 71 de Malakoff, qui, en France, a été le premier, avec les Francophonies de Limoges, à accueillir ses spectacles, en 1999. Comme si les exils successifs avaient imprimé l'impossibilité de se fixer. Pour ne pas subir, encore et encore, la douleur de la séparation et le sentiment de la perte. Ne pas s'enraciner, pour ne pas se déraciner. L'écriture comme seul ancrage.

Tout cela traverse la petite dizaine de pièces écrites par le jeune auteur metteur en scène, et notamment les dernières, Littoral, Incendies et Forêts, qui forment un cycle de l'exil et des origines au souffle extrêmement puissant. Wajdi Mouawad n'y raconte pas sa vie. Mais ses identités multiples et successives ont produit une interrogation sans équivalent dans le théâtre francophone d'aujourd'hui sur les imbrications entre les histoires individuelles et la grande histoire.

D'abord, donc, il y a l'enfance : Beyrouth, au tournant des années 1960-1970. Wajdi Mouawad naît dans une famille chrétienne aisée - un milieu occidentalisé, très francophile : "Mais mon père, qui venait de la montagne, a tenu à nous donner des prénoms arabes. Nous étions les seuls, parmi nos cousins et nos camarades de classe, à ne pas avoir de prénoms français. Cela a sonné comme un rappel constant de mon étrangeté. Un signe que je n'étais pas d'ici..."

Ce prénom, Wajdi, qui signifie "mon existence" en arabe, va signer définitivement cette étrangeté quand la famille arrive à Paris en 1978, après quatre ans de guerre. "Comme tous les Libanais, nous pensions que la guerre allait se terminer rapidement et que nous repartirions." Le conflit s'éternise, s'enlise. Les trois enfants Mouawad restent à Paris, avec leur mère. Le père, qui a été ruiné par la guerre, tente là-bas de sauver ce qu'il reste de ses affaires.

Wajdi Mouawad est alors "un exemple parfait d'intégration réussie" : excellent élève, entouré d'amis, capitaine de l'équipe de rugby du collège. "Mais sans le savoir, sans le dire, nous étions totalement défigurés par cette guerre, par cet exil. C'est peut-être la grande illusion des civils : croire que, parce que vous avez quitté un lieu en guerre pour un lieu en paix, vous êtes sain et sauf." Cette fugue qu'il fait à l'âge de 11 ans, au cours de laquelle il s'arrête dans ce café parisien emblématique, synthétise le malaise. "Le sentiment qui m'a éduqué, c'est l'inquiétude de ma mère", dit-il aujourd'hui. Cet équilibre relatif est encore brisé quand les parents Mouawad décident, six ans plus tard, sans explications, d'émigrer à nouveau, vers le Québec cette fois.

"Ce nouvel exil a été extrêmement rude, avoue-t-il. Je me sentais comme quelqu'un qui vient de survivre à une avalanche, qui remonte à la surface et qui reçoit une nouvelle masse de neige sur la tête."

Surtout, "au fur et à mesure que je m'éloignais du Liban, mon prénom devenait une chose qui s'étirait, se déformait, perdait son sens, devenait l'objet d'abréviations", observe-t-il. Années noires, lourdes, vides. Sa mère meurt, d'un cancer. Mais c'est son visage brouillé, perdu, qui va être à l'origine de son identité d'écrivain et d'artiste.

Il commence à écrire à 16 ans. La recherche de ce visage est au coeur de son écriture, dans ses pièces comme dans son unique roman, qui s'intitule d'ailleurs Visage retrouvé (éd. Actes Sud, comme ses pièces). "Prenez un enfant dont le jouet préféré se casse. Il essaie de recoller les morceaux, mais ce n'est jamais tout à fait comme avant. Maintenant, poursuit-il, en conteur de sa propre histoire, imaginez que ce n'est pas le jouet qui se casse, mais sa conviction profonde que le monde dans lequel il vit est beau et merveilleux. La peine qu'il en éprouve est tellement profonde qu'il en a pour la vie à essayer de recoller. Et à chaque tentative, cela donne une pièce de théâtre..."

Aujourd'hui, son passeport est canadien. Mais quand on le tarabuste pour savoir s'il se sent plutôt "libanais, français ou québécois", il répond qu'il est juif. Ou tchèque. Parce qu'il se sent plus proche de Kafka que de n'importe qui. "Et parce que j'écris. L'écriture et l'exil ont partie liée, depuis toujours."

Quand la guerre a de nouveau éclaté au Liban, cet été, cela l'a "mis en morceaux". Il s'est senti tenu, vis-à-vis de la communauté libanaise de Montréal, de prendre la parole - le texte de son intervention a été publié dans Courrier international du 3 août. Non pour émettre une position politique - "Je ne voulais surtout pas singer les politiciens qui prétendent comprendre la situation" -, mais pour tenter de "cerner l'impuissance et le désarroi qu'il y avait à se retrouver dans ce choix impossible : celui de la haine ou celui de la folie".

En France, où il est demandé partout, difficile aujourd'hui de trouver des détracteurs du travail de Wajdi Mouawad. Les résistances des premières années - certains trouvaient ses spectacles trop narratifs, et "donc trop faciles" - sont tombées devant ce théâtre qui fait de la scène un lieu de haute intensité émotionnelle. Sa puissance narrative et poétique, à l'issue du long voyage proposé par Wajdi Mouawad, laisse les spectateurs de Forêts, à Malakoff, comme ce fut le cas pendant toute la longue tournée en France, bouleversés, en larmes, ovationnant longuement le spectacle. Reconnaissants de ce que ces odyssées du temps présent ébranlent dans leur histoire intime.

Fabienne Darge
Article paru dans Le Monde-édition du 28.10.06


Wajdi Mouawad
"Incendies"

"Rêves"
Quand la fiction théâtrale rejoint la réalité
Itinéraire en 2005 entre Paris, Genève et toute la France

Réservez-vite votre soirée du 10 juin 2005
Venez assister à la pièce de théâtre "Rêves" de Wajdi MOUAWAD, écrivain libano-canadien ayant obtenu un Molières 2005.
Cette pièce est jouée en France depuis deux ans et a déjà été l'hôte des théâtres de plusieurs grandes villes de France. Malgré le planning chargé de la troupe, nous avons réussi à obtenir une soirée exclusive pour la communauté libanaise de Paris qui se reconnaîtra forcément dans cette pièce largement inspirée de notre histoire libanaise. D'aucuns auront l'impression d'avoir vécu certains instants de cette pièce. Ce n'est pas étonnant, vu l'origine libanaise très marquée dans les écrits et la pensée de Wajdi MOUAWAD.
Cette soirée exclusive sera jouée au profit de l'Association Al Lubnaniyah, association libanaise fondée par des ex-combattantes qui ont tourné la page de la guerre et se sont converties au travail social. L'accompagnement des familles en difficulté est devenu leur mission. Que les problèmes soient d'ordre financier, social, relationnel ou émotionnel, les comptables, assistantes sociales et psychologues se dévouent pour les accompagner au quotidien. Les membres de la famille peuvent ainsi renouer le dialogue entre eux et dépasser au fur et à mesure les difficultés qu'ils rencontrent. La pièce se joue à l'Auditorium de l'Institut du Monde Arabe.
Elle sera suivie d'un débat avec la réalisatrice et les acteurs.
Soyez prêts à l'avalanche d'émotions que provoquera en vous cette pièce qui n'en a pas fini de faire parler d'elle.

Pour réserver, visitez le site www.museacharisma.com
et cliquez sur l'icône Rêves à droite de l'écran.


9 Mai 2005
Wajdi Mouawad refuse son Molière du meilleur auteur francophone vivant

Ce n’est pas souvent qu’un Libanais se fait honorer par ses pairs français aux Molières. Pour ainsi dire, cela ne s’était jamais fait. Jusqu’à hier, où, sur la scène du théâtre Mogador, Wajdi Mouawad s’est vu décerner rien moins que le Molière du meilleur auteur francophone vivant pour sa pièce Littoral. Mais il n’était pas là, il répétait au Québec. Et il l’a même refusé : il a voulu déplorer le manque d’intérêt accordé, selon lui, par les directeurs de théâtres aux auteurs. Il s’est fait huer, et c’est dommage, parce que la cérémonie était belle, plus que d’habitude, et qu’elle a récompensé entre autres l’énorme Michel Bouquet dans le Roi se meurt et la trop rare Christine Murillo dans Dis à ma fille que je pars en voyage.

Incroyable anticipation des troubles qui
secouent aujourd'hui le Liban!


Wajdi Mouawad a t-il le souffle d'un devin? On serait tenté de répondre oui.
En effet, sa pièce «Incendies», écrite en 2003, revient sur les 15 années de guerre civile qui ont ensanglanté son pays de 1975 à 1990. Mais pas seulement, puisque son texte théâtral a les résonances d'un avertissement qui prévoit pour le Liban un avenir incertain. Présenté successivement à Monthey et Genève début Mars 2005, dans la mise en scène de l'auteur, «Incendies» n'est pas pour autant un récit historicisé. C'est une réflexion poétique, fragmentée et terriblement lucide sur la colère d'un peuple en conflit, qui questionne ses origines. Il faut dire que Wajdi Mouawad, né à Beyrouth en 1968, vit et travaille aujourd'hui à Montréal.
C'est donc un écrivain expatrié qui parle ici.

C'est le Liban qui se consume dans «Incendies»

Chevillée à l'actualité politique, la pièce du Libanais Wajdi Mouawad est présentée à Monthey et Genève dans la mise en scène de l'auteur. Invité pour la première fois en Suisse, l'écrivain livre ici ses réflexions sur son pays. Entretien:

Q: Etes-vous à la recherche d'un Liban perdu?
Wajdi Mouawad: C'est notamment sur mon enfance dans ce pays que je reviens. J'essaie de retrouver le chemin qui me mène vers elle. J'ai quitté le Liban à la suite d'une décision prise par mes parents. Depuis, je n'ai jamais cessé de recoller les morceaux cassés de cette enfance. Et chacune de mes tentatives donne une pièce de théâtre qui raconte un Liban perdu politiquement, c'est vrai, mais aussi psychiquement. «Incendies» fait ainsi partie d'une trilogie dont le premier volet s'intitule «Littoral», le dernier étant encore en gestation.

Q: Vous vous sentez donc investi d'un devoir de mémoire
envers votre pays?

W.M.: Oui , c'est un devoir de mémoire lié à la vie que je me suis construite au Canada, loin du Liban. L'exil est, dans un certain sens, un pays également. C'était comme si j'avais une double nationalité: une perdue et une autre que je ne désire pas conserver, qui est celle de l'exil. La seule façon de me débarrasser de ce sentiment de perte, c'est l'écriture. Elle est le garant de la mémoire.

Q: En vous référant à la guerre civile, vous dites dans «Incendies»:
«Si on ne trouve pas de solution tout de suite à ces massacres, on n'en trouvera jamais». On croit entendre un manifestant libanais d'aujourd'hui...
W.M.: Oui, c'est juste. C'est une phrase qui traduit le sentiment d'éternité dans le malheur et dans la guerre, que ressentent tous les Libanais. On oublie souvent qu'Europe, fille d'Agénor, jouait sur les plages de Sidon (aujourd'hui Saïda, ville du Sud-Liban, ndlr) lorsqu'elle fut kidnappée par Zeus. Or Europe était une Phénicienne, donc une Libanaise. Et son enlèvement donna suite à un long conflit. La guerre est donc installée chez nous depuis des siècles. Cela dure depuis tellement longtemps qu'on ne peut plus tolérer les promesses de paix sans lendemain. Il faut que ça s'arrête tout de suite.

Q: Quel est le pouvoir d'un auteur comme vous expatrié
d'arrêter une guerre?

W.M.: Le seul pouvoir que j'ai c'est de nommer les choses et de lever ainsi les tabous. Je crois que les Libanais ont un problème avec les interdits. Ils ont honte de beaucoup de faits qu'ils maquillent et drapent de conventions. Mais en même temps ils sont frondeurs dans leur manière de manifester leur honte. Leur courage leur a toujours permis de se réconcilier et de se reconstruire.

Interview
recueillie par Ghania Adamo pour Swissinfo

Les représentations en Suisse:
- «Incendies» Monthey, Théâtre du Crochetan, le 5 mars. Tel: 024 471 62 67
- Genève, Forum Meyrin, du 8 au 10 mars. Tel: 022 989 34 34



L' Association des amis du théâtre populaire d'Aix-en-Provence accueillent à Cavaillon, dans le Vaucluse, en partenariat avec le Théâtre de Cavaillon,
le jeudi 31 mars à 19h et le vendredi 1er avril à 20h30
Incendies écrit et mis en scène par Wajdi Mouawad.
avec Eric Bernier, Gérald Gagnon, Reda Guerinik, Andrée Lachapelle, Marie-Claude Langlois, Julie McClemens, Mireille Naggar, Isabelle Roy, Richard Thériault

Infos: 33 (0)4 42 26 71 04



Biographie


Wajdi Mouawad est né en 1968 au Liban
qu’il quitte à l’âge de huit ans avec sa famille, pour un premier exil, à Paris.
Huit ans plus tard, ses parents émigrent au Québec. Wajdi Mouawad obtient son diplôme de l'École nationale de théâtre du Canada en 1991.
Cofondateur du Théâtre Ô Parleur, il a signé la mise en scène de nombreux spectacles tels que Six personnages en quête d’auteur, Ce n’est pas de la manière qu’on se l’imagine que Claude et Jacqueline se sont rencontrés et Les Troyennes.
Il a également mis en scène ses propres textes dont Rêves et Littoral.
Ce dernier lui a d’ailleurs valu le Prix du Gouverneur général en 2000 et a été présenté au Festival d’Avignon en juillet 1998.
Il a aussi signé l’adaptation théâtrale d’œuvres comme Don Quichotte de Cervantès et Trainspotting de Welsh.
De 2000 à 2004 , il a été directeur artistique du Théâtre de Quat’Sous.
Son dernier roman Visage retrouvé est paru chez Actes-Sud Papiers.
Il vient d’achever le tournage du film Littoral, adaptation de son texte,
sorti en 2004.
En janvier 2002, le gouvernement français lui décerne le titre de chevalier de l'Ordre National des Arts et des Lettres pour l'ensemble de son oeuvre.


En tournée du 1er Mars au 28 Avril 2005

Forbach - Le Carreau
Avenue Saint-Rémy BP 40190 57603 Forbach +33 (0)3 87 84 64 34 www.carreau-forbach.com mars 2005 ma 01 20 h 00 me 02 20 h 00

Meylan (Grenoble)
Hexagone - 24 rue des Ayguinards BP 78 cedex 38423 Meylan
+33 (0)4 76 90 00 45 billetterie@hexagone-meylan.asso.fr www.hexagone-meylan.asso.fr
ma 15 Mars 20 h 00 & me 16 20 h 00
je 17 20 h 00 & ve 18 20 h 00

Théâtre National de Toulouse
1, rue Pierre Baudis BP 449 31009 Toulouse +33 (0)5 34 45 05 05 accueil@tnt-cite.com www.tnt-cite.com/ ma 22 20 h 30 me 23 19 h 30 je 24 19 h 30 ve 25 20 h 30 Théâtre de la Passerelle - 137 boulevard Georges Pompidou 05010 Gap +33 (0)4 92 52 52 52 ma 29 20 h 30

« L’incendiaire ambiguité »
par Houssam Mroué
Si je commençais mon article en vous disant que la pièce jouée ce soir à Toulouse ( au Théâtre national de Toulouse ), parlait d’un homme qui par le hasard des choses, fût amené à concevoir un enfant avec une ravissante dame, qui n’était personne d’autre que sa mère… Vous me répondrez, « La machine infernale » de Jean Cocteau ; Détrompez-vous, la pièce dont il est question, s’intitule « Incendies », écrite et mise en scène par le brillant et talentueux Wajdi Mouawad. Né au Liban en 1968 ( quelques années avant le début de la guerre civile ) ; ce dernier retranscrit durant 3h15, les horreurs, désespoirs, amertumes, douleurs des libanais durant la période 1975-1989 avec une poignée d’humour, de rêve, d’espoir et d’optimisme sans doute propres à la nature de ce généreux auteur .
Je ne m’attarderai pas sur l’histoire véhiculée par l’incroyable et magique mise en scène de tous les comédiens durant ces quelques heures passées dans ce monde imaginaire et pragmatiste à la fois ; car aucun mot, aucune phrase et aucun geste, ne saurait représenter le réalisme et la simplicité des scènes jouées. « Il faut le voir pour y croire », comme le diraient certains. La pièce se déroule pendant la guerre et met en aval, l’histoire de 2 enfants à la recherche des faces cachées de leur généalogie, face au silence qui accompagnait le vivant de leur mère. Dans un décor sombre rappelant le contexte des combats, les personnages se lancent souvent dans des monologues au ton narcissique, haineux, satirique… avec à l’arrière plan des effets spéciaux qui nous donnent l’impression de vivre les évènements, et non seulement de les admirer. C’est ainsi, qu’il se met à pleuvoir dans une des scènes, noyant le public dans la totale admiration et le respect.
Il y a une chose qui m’a étonnée dans cette dramaturgie ; c’est le fait de ne prononcer à aucune reprise le mot « Liban » . Il est vrai que le nom de plusieurs villes libanaises a régulièrement été prononcé tel que Nabatieh ( qui est dailleurs ma ville d’origine ), mais j’essaie de me mettre dans la peau d’un français qui était présent ce soir là, et qui n’a aucune connaissance sur ce pays. L’auteur voudrait-il que chaque personne du public ayant vécu un conflit dans n’importe quel pays du globe, se reconnaisse dans l’un des personnages ? Il est aussi probable que Mr Mouawad refuse de reconnaître le Liban dans son histoire de déchirure et de désespoir, estimant que l’authentique Liban repose dans son évolution pacifique et légendaire qui a toujours fait de lui jusqu’à cette affreuse et lâche guerre, la « Suisse du Moyen-Orient » ?
Quoi qu’il en soit, « Incendies » relate en parallèle la naissance et la mort, la folie et la raison, le bonheur et la douleur, les rires et les pleurs, le réel et l’abstrait, jusquà pouvoir même représenter la pluie et le beau temps.
Ce qui est le plus magique dans cette pièce, c’est de suivre l’évolution de certains personnages, de leur naissance à leur adolescence sans s’attarder sur la notion du temps, grâce à l’habile et merveilleuse imagination de l’écrivain. Il est de plus agréable, d’écouter les comédiens avec leur accent canadien dans un contexte oriental. A vrai dire, tout ceci m’amène à définir Mr Mouawad sans même le connaître, comme étant une personne ambiguë ayant un caractère critique et optimiste face aux évènements qui l’entourent ; il expose souvent le malheur avec dureté et incompréhension, mais réussi malgré tout de le rendre moins pénible à sa façon, et d’apporter un message d’espoir et d’amour à l’humanité souvent ravagée depuis la nuit des temps.
Enfin, après un long voyage dans l’univers « Mouawadien », nous fûmes plongés dans le noir, et un bruit, telle une explosion envahie la salle… Ce n’était pas le son des bombes, ni des mitraillettes, mais tout simplement celui des applaudissements de centaines de gens, venues saluer avec reconaissance et excitation, le talent, le courage, et l’espoir, d’un homme ayant vécu la guerre, et qui ose par la culture dire non à un avenir incertain et de promouvoir l’amour, la fraternité, et le dialogue, afin de briser le silence qui mène parfois à faire d’un havre de paix, un terrain ravagé par les querelles et les incendies…
Bravo Mr Mouawad, bravo à tous les comédiens….
Et à très bientôt pour une nouvelle pièce j’éspère…

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